Un film français tourné dans la jungle cambodgienne, en langue japonaise, sur un sujet qui parle peu aux occidentaux, voila une entreprise ambitieuse qui fut complexe à faire produire, en témoigne la liste impressionnante des contributeurs.
Arthur Harari a bien fait de défendre son projet, car son film est sensible, profond, méditatif, beau, mais classique et humble... Presque japonais (bien qu'un peu bavard), Harari ne fait pas dans la démonstration ou la grandiloquence, il ne cherche jamais le psychédélisme de Coppola (Apocalypse now) ou la spiritualité existentielle de Scorcese (Silence), c'est sa force et parfois sa faiblesse. La violence et la mort, présentées crues, y sont d'autant plus poignantes et écœurantes que le spectateur en connait l'absurdité et la gratuité dans ce conflit qui n'est plus.
En refusant tout le long du film le jugement, en n'étant jamais ni dans l’empathie ni dans l’antipathie de son "héro", il laisse persister l'incompréhension et le mystère tout en posant les questions de la nature humaine ( de l'endoctrinement, de l’entêtement, du jusqu’au-boutisme) et de la vérité (les journaux et la radio vus comme source de manipulation et de propagande de l'ennemi qui n'est pas sans rappeler notre époque). Une épopée naturaliste qui reste dans la tête par sa richesse et qui laisse, dans le bon sens du terme, l'impression d'avoir vu un excellent vieux film.