Austen of the Dead

"C'est une vérité universellement reconnue qu'un zombie en possession d'un cerveau désire avoir plus de cerveaux."
Si ce détournement zombiesque de la célèbre phrase d'introduction du livre de Jane Austen ne vous décroche pas un grand sourire en début de film, les chances pour que ce "Orgueil et Préjugés et Zombies" (d'après le roman de Seth Grahame-Smith) emporte votre adhésion réduisent déjà de moitié.

En effet, les néophytes d'"Orgueil et Préjugés" ou de ses multiples adaptations risquent grandement de rester sur leur faim, surtout s'ils étaient seulement venus pour assister à un bon gros défouraillage sanglant de morts-vivants en costumes d'époque, car le film de Burr Steers (co-écrit avec un certain David O. Russell) se concentre avant tout sur une version parodique du roman d'Austen (déjà teinté d'ironie) où l'invasion de zombies de ce début du XIXème siècle n'est qu'un prétexte pour mieux tourner en dérision tous ces personnages aujourd'hui inscrits dans la mémoire collective.
Les connaisseurs de cette célèbre histoire ne pourront que s'amuser de leurs traits de caractère réécrits dans un contexte des plus farfelus : Darcy avec un orgueil démesuré de militaire/tueur de zombies, Wickham dont la fourberie prend des proportions apocalyptiques, Mr Collins probablement dans sa version la plus imbécile/drôle que l'on ait vu (génial Matt Smith) ou bien évidemment les cinq filles Bennet toutes adeptes des arts martiaux. On passe un indéniable bon moment à les voir régler leurs éternels conflits sentimentaux en se frappant au milieu d'attaques de morts-vivants.

Mais il y a un (énorme) hic : aussi amateur que l'on soit du livre de Jane Austen, on s'attendait aussi à voir un joyeux massacre de zombies en règle et, de ce côté, "Orgueil et Préjugés et Zombies" reste étonnamment sage, comme s'il n'arrivait jamais à passer à la vitesse supérieure pour atteindre le feu d'artifice qu'il ne cesse de nous promettre. Loin d'être sanguignolent, le film est très avare en action et les quelques scènes de combat sont d'une déception aussi immense que la platitude de leur réalisation. Même dans la séquence finale où les zombies redeviennent enfin une vraie menace de masse, on ne verra pour ainsi dire jamais les personnages en découdrent avec eux, nous laissant sur l'amère déception de ne pas les avoir vu réellement en action au cours d'une sympathique boucherie (et on les aura aperçu s'entraîner à maintes reprises pourtant). De quoi devenir très vite gênant lorsque le concept du long-métrage est uniquement basé entre un mélange de parodie et de violence qui se voulait jouissif...

Comme le Londres du film ou l'état de semi-conscience dans lequel se trouve les zombies la majorité du temps, "Orgueil et Préjugés et Zombies" est dans "l'entre-deux". Amusant dans sa parodie de l'oeuvre de Jane Austen (bien plus que la première adaptation d'un livre de Seth Grahame-Smith, "Abraham Lincoln - Chasseur de Vampires", d'un premier degré consternant) mais terriblement décevant par son manque d'ambition violente pourtant indissociable du projet que l'on nous avait vendu.