A l'annonce du scénariste Travis Beacham et du pitch pour le nouveau film de Del Toro, on était en droit de s’inquiéter. La méthode du scénario prétexte à réaliser un pure trip geek n'ayant pas accouché d’œuvres inoubliables. (Sucker Punch, Le choc des titans...) C'était sans compter sur la faculté d'adaptation de notre gros mexicain, Qui devant un scénario des plus pauvres, décide de bazarder tout dialogues inutiles afin de nous amener directement là ou il veut. On évitera donc la sempiternelle demi heure ou les monstres se font attendre, ici la situation initiale impose tout de suite son caractère chaotique, l'action brute étant le quotidien des protagonistes visible à l'écran. L'axe principal du scénario gravitera donc essentiellement autour des relations entres les pilotes, Qu'elles soient des relations fraternelles, paternelles, amicales voir même hiérarchiques. Des figures iconiques et des schémas qui frisent la caricature mais qui ne sont pas s'en rappeler les mangas comme Albator ou Speed Racer. Afin d'alimenter le maigre scénario dont il dispose Del Toro impose le grand spectacle à coup de références et de mise en scène inspiré. Pari réussi?


Del Toro ne le cache pas. Les influences sont multiples et distillées tout au long du métrage. Les plus évidentes sont bien sur le kaijū eiga, littéralement, "cinéma de monstres" créé par Ishirō Honda et son fameux Godzilla, ainsi que l'oeuvre complète de Ray Harryhausen, maître incontesté de l'animation des monstres de 1950 à 1980. Le film leur ai d’ailleurs dédié.
Autre référence bien présente, les Mechas, qui ne sont pas sans rappeler les œuvres du mangaka Gō Nagai à qui on doit Albator.
Porteur d'un hommage aussi puissant, Del Toro respecte ses aînés et finit par les égaler en mettant à son service, la technologie numérique d'ILM.
Bien sur les références ne s’arrête pas là, Le Chtulu de Lovecraft, la mythologie scandinave, le serpent de Midgar, le Léviathan et le kraken sont autant d'influences qui planent sur les spectres des kaijū. Et si on pinaille un peu, on peut même y voir un clin d’œil au sabreur manchot.
Si les thèmes du film sont imprégnés de culture pop, La photo quand à elle lorgne plus du coté des œuvres picturales, Del Toro soulignant lui même l'importance des toiles de Goya ou de Hokusai qui par leurs attraits fantasmagoriques vont influencer le travail du directeur photo Guillermo Navarro.
Un traitement des couleurs par opposition, couleurs chaudes et froides chacune ayant une thématique bien précise. Cela peut paraître anecdotique, mais à l'heure ou les films sont tournés comme des clips MTV, un Directeur artistique qui traite correctement sa photo fait plaisir à voir. Le traitement nocturne de Hong-Kong rappelant, lui, beaucoup le travail de Benoit Debis sur Enter the void. les combats étant filmés de nuit, à la lueur des néons de la ville. En cela Pacific Rim s'impose comme l'anti transformers qui filmait ses robots en plein jour à la manière d'une pub pour bagnole.


Le fantôme de la trilogie de Mickael bay n'est jamais très loin et pourtant Del Toro ridiculise les 3 opus rien que dans les 10 premières minutes en instaurant une mise en scène à la fois élégante et dantesque.
Car c'est bien là la force de Pacific Rim, jouer avec les rapports échelles, nous amenant à terre pour mieux ressentir l'effet des combats titanesques puis nous trimbaler dans une caméra omnisciente virevoltant autour des mechas. Pas de plan séquence tape à l’œil, ici, le cadre se pose toujours de manière intelligente, accentuant l'impact des combats et faisant sortir nos yeux de leurs orbites. Il y à du John McTiernan et du Frazetta chez Del Toro!
De la même façon le réal choisit de filmer les lieux de façon décalé. Préférant nous montrer les bas fonts de la ville avec le marché noir plutôt que les grandes instances mondiales. Le lieu dessine à lui seul un univers indéfini. La méthode était déjà présente dans ses anciennes réalisations comme Hellboy 2 et Blade 2. Une manière de représenter la société dans ce qu'elle a de plus cosmopolite et de plus complexe, Chaque détail nous informant un peu plus sur la vie au quotidien des habitants.
Autre point intéressant, le montage et la courbe d'intensité. Les premiers kaijū étant montré via des postes de télévisions on se place en tant que simple spectateur, puis, plus le film avance plus on se rapproche de ses monstres inaccessibles. L'action et la curiosité redouble d'intensité à chaque nouvelle confrontation.
Pour finir sur la forme le film est techniquement irréprochable, ILM ayant fait un travail magnifique, l'impression de fake ne transparaît jamais, même pour l’œil le plus aiguisé.


Dernier point et pas des moindre, la BO tout simplement superbe composé par Ramin Djawadi qu'on connaissait déjà pour son travail sur Game of Throne, nous lâche un thème qui ne sortira plus de votre petite tête. 6 petites notes qui font leurs effets tout de suite qu'elles soient jouées par l’orchestre symphonique ou par la guitare saturé de Tom Morello (Rage against the machine) Là aussi tout en dualité.


En conclusion pas le meilleur film de son auteur mais pourtant un de ceux qui lui ressemble le plus. Del Toro est un passionné qui parle aux passionnés, sans laisser la plèbe de coté. Utilisant son talent pour hisser la culture pop au niveau d’œuvres prétendument artistique, Dans Pacific Rim l'art n'est jamais factuel: L'art est percutant, l'art est sensoriel. Construisant son film comme une oeuvre Wagnérienne ou la musique, les décors et la mise scène forme un tout unique et cohérent, Del Toro crée l'opéra des Titans!


Les monstres ont trouvés un nouveau maître et il vient de lâcher la meute!

gordongraf
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le 6 août 2013

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Simon Phoenix

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