Fev 2011:

Julien Duvivier, Michel Simon et Georges Simenon : avec ce trio, difficile d'éviter le bon film, voire le très bon. Je n'ai pas lu "Le testament de M. Hire" de Simenon, par conséquent je ne sais pas à qui l'on doit l'aboutissement de cette histoire.

Quoiqu'il en soit, la façon dont elle formalise la rapide dissolution du vernis policé de ces habitants qui laisse apparaitre toute la bêtise et la férocité avec laquelle ils manifestent une haine imbécile et animale à l'encontre d'un individu différent, en marge et donc facilement identifiable comme bouc émissaire, cette manière que le film a de décortiquer l'évolution de ces personnages est magnifiquement maitrisée dans une écriture toujours équilibrée mais également grâce à une ingénieuse mise en scène de Julien Duvivier. On pense immanquablement à "M" ou plus encore à "Fury" de Fritz Lang mais la patte Duvivier est bien présente.

Bien que je ne la connaisse pas véritablement, je la subodore : Les champs / contre-champs qui situent bien les relations entre les personnages (affrontements, dépendances, sentiments, etc.), les cadrages qui permettent de filmer deux actions simultanément, le travail pictural d'une photographie d'un beau noir et blanc qui découpe admirablement les personnages, le dynamisme du montage qui organise les différents tempos des scènes, la direction des acteurs qui semble très efficace avec un certain naturalisme et le jeu des comédiens qui est canalisé, sobre et direct.

Des comédiens, je ne suis pas étonné de trouver ahurissante la prestation de Michel Simon. Ce type est extraordinaire de naturel : il respire la simplicité. L'impression qu'il ne joue pas, mais vit son rôle s'impose d'emblée, inaltérée.

Viviane Romance est une actrice que je ne connais pas. Je n'ai que peu de souvenirs d'elle dans "La belle équipe" que j'ai vu il y a bien trop longtemps. Ici, je la trouve très juste, très fine surtout dans les dernières scènes où elle doit exprimer un trouble profond entre mauvaise conscience et amour pour sa crapule. Au delà de sa gentille frimousse, elle fait preuve d'une sureté de jeu assez remarquable.

Le regard acéré de Georges Simenon sur la petitesse d'esprit, la lâcheté ou la connerie des petites gens, la facilité qu'ils ont à sauter sur la moindre apparence pour juger et condamner ce qu'ils ne comprennent pas est en tout point formidablement mis en image. La réalisation de Julien Duvivier transpire et étale sa classe, sans arrogance ni esbroufe. Juteux!
Alligator
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le 16 avr. 2013

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Alligator

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