PARASITE est une satire résolument actuelle. Une famille déséquilibrée par le besoin, comparablement à celle de la précédente Palme d'Or, UNE AFFAIRE DE FAMILLE. La rencontre de deux classes sociales opposées qui, reflétant la crise d'un monde à deux vitesses, ressemble à celle de BURNING. Au cinéma aujourd'hui, les regards se croisent et se multiplient quand ils se focalisent sur les travers de notre société.


PARASITE est beaucoup plus nerveux que ces deux précédents films cités. Sa mise en scène foisonnante est remarquable dans ses variations et son ingéniosité. Le rythme est tout de suite entraînant, un montage ultra efficace, parfaitement agrémenté par la bande-originale. La mise en scène, très léchée, évolue au fil de l'intrigue. On va de la comédie familiale au drame-horrifique en passant par le thriller-social, la fable politique et le huis-clos, toujours avec maîtrise. Dans ce parcours fou, les personnages sont tous saisissants, servis par des interprètes plus que convaincants et une écriture malicieuse.


L'écriture est aussi beaucoup plus limpide et rationnelle qu'avec UNE AFFAIRE DE FAMILLE ou BURNING. Le scénario est d'une très grande richesse. Il dissèque le comportement dans ses pires penchants, à travers une intrigue qui embarque totalement. PARASITE dresse des situations follement éloquentes.
L'absence totale de solidarité est frappante dans ce récit. Elle touche chaque protagoniste, ce qui évite tout manichéisme. La famille plus démunie repousse avec condescendance le mendiant qui commence à envahir leur piètre territoire, puis elle manigance des stratagèmes pour se sortir de la misère, sans se soucier des dommages collatéraux. La famille en vient même à enfoncer ceux qu'ils ont démunit. Ils perdent la raison et la dignité dans une société qui les pousse au consumérisme absolu. La famille Park paraît d'abord bienveillante et attentionnée. Le rapport qu'elle entretient avec ses employés s'avère en vérité d'une bêtise crasse. Ils portent un jugement et une distance terriblement condescendants. Plus le lien se ressert entre les deux familles, plus on constate l’individualisme dans laquelle chacune d'elles s'enferme. La conclusion marque avec choc le comportement égoïste qui désolidarise l'humanité. L’instinct de survie n'est guidé que par ses craintes personnelles et ne prête plus aucun regard sur ceux qui nous entourent. On porte secours à son enfant évanouit plutôt qu'aux victimes ensanglantées. Son propre confort prime sur la raison du plus démunit. Une intempérie catastrophique pour un quartier pauvre, n'est qu'une pluie rafraîchissante bien venue chez les haut-placés.
PARASITE démontre la fracture entre deux classes divisées par la société coréenne. Perchés et entassés dans leur abris sous-terrain miteux, à la recherche d'une connexion et d'un rayon de soleil, la famille plus démunie débarque dans un autre monde chez les Park. Leur maison paraît très connectée (interphone, talkies-walkies, branchement de lumières). -Comme si finalement, le confort poussait à distancer les rapports humains.- Tout est vitré. La lumière inonde la maison et tout semble transparent. -Comme pour se donner l'illusion de tout voir et tout donner à voir. Paradoxalement ce domaine est bien moins ouvert au monde (interphone, clôture, portes cachées) que le taudis des pauvres.
Le scénario déjoue les clichés d'une société qui mise sur l'apparence. La malice et le vice ne se trouvent pas toujours dans la fortune; de même que la crédulité n'est pas affaire de classe sociale. Le pied de nez est parfaitement cynique quand la mère de la famille Park préjuge une grande naïveté chez la jeune fille...qui vient tout juste de l'entourlouper avec ses théories d'art-thérapie. Les personnages sont entiers dans leur complexité et ne figure aucune morale. Ils sont le reflet terriblement cynique de notre monde actuel.


PARASITE captive dans sa narration. PARASITE fait peur, fait rire jaune, consterne, ahurit. PARASITE passe par tous les styles pour nous accrocher. PARASITE puise dans l'art du cinéma pour nous faire admirer la décadence de l'être humain.

adamkesher01
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le 15 juil. 2019

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Adam Kesher

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