Attention : ce bref éloge du dernier long métrage de Bong Joon-Ho risque de dévoiler certaines informations concernant les personnages et les situations développés par le cinéaste coréen tout au long de son film. Nous vous conseillons donc préalablement sa découverte en salles, afin de mieux revenir vers ces quelques lignes par la suite...
Véritable chef d'oeuvre de l'année 2019 Parasite s'agit d'une consécration définitive pour le génial Bong Joon-Ho. Déjà responsable des excellents Memories of Murder et The Host tournés il y a maintenant plus de dix ans le réalisateur s'est vu attribuer la fameuse Palme d'Or au dernier Festival de Cannes, succédant plus qu'honorablement à l'insipide Une affaire de famille de Kore-Eda Hirokazu.
Parasite de Bong Joon-Ho n'est rien de moins qu'un film gigantesque, à la fois capable de repousser les limites de l'audace cinématographique sans pour autant perdre de vue d'indéniables ambitions scénaristiques. En confrontant deux familles sud-coréennes diamétralement opposées socialement ( la tribu ghettoïsée vivant dans un appartement insalubre d'une part ; la bonne famille solliciteuse habitant un petit monument d'architecture d'autre part ) le cinéaste nous entraîne au coeur d'un pays et d'une époque, montrant avec une acuité non dénuée d'humour les inégalités sociales de ses contemporains.
Il est fort probable que Parasite s'agira d'une référence majeure du cinéma de la fin des années 2010 pour les générations à venir : crise de l'emploi et chômage liés à la surpopulation, méfaits des réseaux sociaux et des outils technologiques pernicieux, violence peu présente mais extrême lorsqu'elle se manifeste... D'emblée le groupuscule de laissés-pour-compte évoque tout un imaginaire grotesque, situé à mi-chemin entre les Affreux, sales et méchants de Ettore Scola et la famille Thénardier de Victor Hugo.
A la fois drame familial d'une grande complexité d'écriture ( chaque personnage s'avère particulièrement bien travaillé par Bong Joon-Ho, des nantis aux miséreux en passant par les condamnés...), huis-clos cocasse mais anxiogène dans le même temps ( Parasite fait en quelque sorte figure de home invasion étonnamment burlesque ) et thriller politique finalement désabusé le film nous entraîne dans un concert d'images remarquablement composées, étayées par un récit au fil conducteur et aux enjeux solides. La meilleure Palme d'Or depuis Winter Sleep.