Puisant son inspiration chez des auteurs aussi divers que Peter Handke, Nathanaël Hawthorne ou Patricia Highsmith, Wenders a toujours été fasciné par le milieu culturel américain, où il semble avoir trouvé un port d’attache provisoire avec ce road movie contemplatif dont la quête du personnage principal ne semble déboucher que sur un horizon absurde et sans espoir.Son souci d’instaurer un cinéma sans véritable histoire, à mi-chemin de Godard et d’Ozu, qui laisserait apparaitre les choses telles qu’elles sont, avec la simplicité du constat qui n’appelle pas d’avantage de commentaires, semble trouver ici son exception à cette forme d’objectivité non exempte d’une certaine froideur.Wenders est donc aussi capable d’émotion, comme il l’avait déjà prouvé au demeurant avec son bouleversant « Nicks Movie ».Ce voyageur sans bagages, moderne baladin du monde occidental, à la conquête d’un obscur et insaisissable Graal, a réalisé avec Paris Texas une sort de western immobile, sans diligence, sans shérif, sans Indiens, un voyage au bout du désert avec comme guide un Ulysse certes taciturne et muet pendant un grande partie de l’odyssée (en fin de course, le héros pourra à peine communiquer, à travers une vitre) mais au final au combien bouleversant (incroyable Harry Dean Stanton).Très proche de l’univers esthétique du cinéma américain des années 80, Wenders perd cela dit ici en profondeur ce qu’il gagne en intensité émotionnelle, et sans doute faudra-t-il à l’avenir lui privilégier les itinéraires un peu poisseux et à la marge d’un « ami américain » à cette ballade chromatique s’inscrivant sans grand discernement dans la tendance d’une époque.On en retient des images d’étendues arides, de motels et de routes sans fin, avec ce but ultime et aléatoire : la recherche d’une unité brisée, fragile rêverie porteuse d’une tenace nostalgie de l’innocence perdue.