Quadrille incestueux au jardin d’Eden

En poussant les portes de la salle de cinéma, une fois le générique achevé, le spectateur s’introduit dans un jardin d’Eden aux saveurs particulières …
L’histoire mise en scène par Anne Fontaine est en effet assez iconoclaste : à l’aube de la cinquantaine, Lil et Roz, succombent aux charmes de leurs fils respectifs. Soit une version féministe de la Bible où ce n’est plus Eve qui sort de la cuisse d’Adam ni qui le pousse à croquer la pomme …et quand bien même, cet interdit est loin de faire basculer les protagonistes dans le monde réel, au contraire, il renforce le cadre de leur paradis.

Perfect Mothers est cependant loin de la parabole. Il s’agit plutôt d’une chronique sur le désir, avec, pour chaque personnage, une manière différente de l’apprivoiser.
Une manière très pure pour Ian, le fils de Lil, qui tombe simplement amoureux de Roz. Regards en coin puis attentifs, gestes ambiguës, mélancolie…Ian est peut-être l’acteur le plus innocent de ce quadrille. Il séduit Roz mais c’est lui qui se retrouve sous son emprise.
A l’inverse, Tom est attiré par le caractère outrancier d’une relation avec une femme d’âge mûre. Ses rapports avec Lil sont bruts, ils éprouvent l’un pour l’autre un impétueux désir physique qui bascule du flirt vers la romance sexuelle. Paradoxalement, c’est le passage à l’acte de Ian et Roz qui pousse Lil et Tom dans les bras l’un de l’autre, par caprice d’abord, par envie ensuite.
Tom qui surprend sa mère sortir en catimini de la chambre de son ami, se précipite chez Lil qui… se laisse aller. Elle prend très vite goût à ce plaisir charnel qu’elle redécouvre à la manière d’une jeune adolescente.
Lil et Tom n’essayent pas de construire quelque chose mais vivent dans l’instant. Etrangement donc leur relation semble beaucoup plus saine dans la mesure où Lil ne s’imagine qu’en tant que partenaire éphémère. Pourtant, des deux amies, c’est elle qui souffrira le plus de sa séparation.
Le personnage de Roz est en effet une énigme. Nul ne comprend pourquoi elle cède aux avances de Ian alors qu’elle semble encore attachée à son mari. Puis, nul ne comprend pourquoi elle met fin à sa relation avec Ian, alors même qu’il n’imagine pas leur couple autrement que dans la durée.
L’hermétisme sentimental de ce personnage est peut-être la grande faiblesse d’un film auquel on attachait davantage d’ambitions. Car il ne faut pas s’y tromper, loin de livrer un message progressiste, Perfect Mother sombre finalement dans le conservatisme. Les deux garçons se marient avec des femmes de leurs âges avec lesquelles ils peuvent avoir des enfants (la reproduction familiale est en marche) et les deux belles mères deviennent des grands-mères formidables, comme elles l’ont toujours rêvé.

Malgré un final désarmant, on reste mitigé face à ce portrait libertin de deux cougars qu’on aurait facilement poussé dans les bras l’une de l’autre…Anne fontaine ne va pas si loin…dommage !