Dans le noir de tes yeux

Qui suis-je? Cette question d’identité et surtout le sentiment amer de frustration à chaque fois que l’on essaie d’y répondre nous hante constamment. Refuser de parler, sombrer dans le silence comme une tentative de s’en sortir et c’est alors que le monde, les gens, habituées à entendre toutes ces petites histoires, mensongères et insignifiantes, dans le but de se faciliter la vie, deviennent angoissés, perplexes à l’idée de ne “rien” savoir sur toi, de ne plus être guidées, d’être perdues. On peut alors se sentir enfin fidèle, cohérent avec soi-même profond, serein et fier d’être dans le vrai. Seuls les yeux, de gestes minimes et ridiculement grossiers trahissent ce désarroi que l’on peut ressentir et que les autres te renvoient comme un miroir, plantés face à toi. L’autre, à premier regard antagonique, différent, extérieur, parle, t’inonde par un tas d’informations de peu de valeur. Mais c’est à partir de ce moment que tout bascule et les frontières commencent à s’effacer, progressivement le spectateur lui-aussi est trompé, incapable de discerner ce que, pourtant, on voulait préserver, sauvegarder du parler des autres. Les yeux et le mécanisme de regard deviennent alors ce point d’accès à autrui et la perte de soi-même. S’agit-il d’une masque ou de la véritable identité? Qu’est-ce que retrouve finalement Elisabet alors que Alma semble perdre, se perdre. Ces questions de l’identité, personnelle et sociale, sont donc au centre du film qui ne délivre pas d’échappatoire que cherchait désespérément Elisabet. Fusion et confusion dans un univers simple, poétiquement joli et émotionnel, des gros plans sur les visages comme pour se rapprocher plus facilement de ce qu’ils recèlent et des contrastes parfois ambigus ne sont que quelques éléments qui rendent ce film un chef d’oeuvre