Derrière le voile de l'existence

Comment montrer l'invisible ? Comment dire l'indicible ? Seul l'art semble être en mesure de répondre à ces énigmes, de dépasser les limites apparentes du réel pour mieux le dévoiler. En explorant les terres du fantastique et du spiritualisme, Personal Shopper d'Olivier Assayas s'inscrit en tout cas dans cette audacieuse entreprise.

Vivant dans le monde hyper matériel et superficiel de la mode, Maureen, interprétée par une maussade et fragile Kristen Stewart, habite à Paris en attendant que son frère jumeau, récemment victime d'une crise cardiaque, lui donne des signes depuis l'au-delà. Tout comme son défunt frère, Maureen est en effet médium et tente ainsi de capter les infimes variations de l'air, de la lumière ou de maisons inhabitées pour saisir les messages que pourrait vouloir lui transmettre son frère.

Le film varie ainsi continuellement entre le défilement banal du quotidien de Maureen, réduite à acheter des habits de luxe pour une star capricieuse, et le surgissement imperceptible et pourtant saisissant d'indices d'esprits flottant entre deux mondes.

Si le sujet est indéniablement risqué et pourrait vite basculer dans le ridicule, la finesse d'écriture et surtout la qualité de mise en scène d'Olivier Assayas permettent de maintenir le film constamment en équilibre entre le réel et le fantasmagorique, offrant au spectateur de purs moments de grâce où l'inconcevable apparait soudainement à l'écran de manière naturelle et bouleversante (à l'image de la scène du verre cassé, je n'en dirais pas plus). Des moments qui font écho à d'autres scènes mythiques du cinéma, comme le final d'Ordet de Dreyer, où l'impossible devient possible.