Haute Couture pour bassesses décousues.

En sortant de la projection de « Phantom Thread » je pensais avoir vu un biopic et quelle ne fut pas ma surprise en apprenant que Reynolds Woodcock est en fait un personnage fictif inspirés de plusieurs grands couturiers comme Cristóbal Balenciaga…
Le scénario est tellement excellent, rigoureux et précis que ce patron a permis de créer un habillage de personnages plus vrai que nature !
Et si l’on considère que Paul Thomas Anderson a écrit le scénario, réalisé le film tout en étant aussi le directeur de la photographie, on peut se demander s’il ne livre pas de sa vie privée.
Peu importe au final, ce qui compte est la beauté de son ouvrage et de son écrin magnifique et rigide à la fois qui sied totalement à l’atmosphère et à l’esthétique du film.
Entre ses cadrages dépouillés et stricts, les éclairages ultra soignés, le timing des scènes, la précision des dialogues coupés aux ciseaux, rien n’est laissé au hasard et tout est ajusté au millimètre.
Les somptueux costumes de Mark Bridges ainsi que les maisons utilisées pour le tournage parachèvent cette excellente et luxueuse reconstitution de l’Angleterre des années 50.
Le trio amoureux est absolument parfait lui aussi ! Daniel Day-Lewis est superbe en dandy charmant doublé d’un vieux garçon aux habitudes tenaces et autoritaires. Vicky Krieps, peu connue jusque-là, est vraiment troublante et parvient à être troublante et sournoise tel un joli serpent. Enfin, Lesley Manville est un roc au calme Olympien.
Rarement une intrigue amoureuse ultra névrotique et aussi follement originale n’a été portée à l’écran avec une telle pertinence. Loin d’être cousu de fil blanc, le film fini par piquer ceux qui ont oublié de porter un dé à coudre. Film d’amour de la création, film sur les rapports de force, sur les temps des couples, ce qui pouvait laisser croire à de la guimauve devient un pudding des plus copieux.
Un film de Haute Couture, aussi élégant et froid qu’une princesse sur papier glacé et aussi vénéneux que la plus somptueuse et étrange des passions, disséquée couche par couche, tel un champignon majestueux.

ATHMOS
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le 20 févr. 2018

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ATHMOS

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