La Présentation





Phantom Thread est un film de Paul Thomas Anderson sorti en 2018 avec Daniel Day-Lewis (dont il s'agit du dernier film), Vicky Krieps et Lesley Manville dans les rôles principaux.


Le film nous plonge dans la vie du couturier Reynolds Woodcock, particulièrement réputé dans le monde de la mode.


Reynolds est extrêmement proche de sa sœur, Cyril, qui est la seule femme dans sa vie depuis la mort de sa mère, jusqu'au jour où il rencontre Alma, une jeune femme qui deviendra sa maîtresse et sa muse !





Tout lâcher





Phantom Thread s'attache à nous montrer la complexité et la difficulté d'un homme à se laisser aller et enfin réussir à maîtriser ses obsessions.


Cependant, le film évite les clichés du film d'époque avec un personnage obsessionnel qui tombe amoureux pendant que sa copine va commencer à entrer dans le milieu, puis qui déjoue les pièges et autres.


PTA dans tous ces films est attiré par les détails et tout ce qui est caché, que ce soit les éclairs de colère de Barry Egan dans Punch Drunk-Love, la violence et la condescendance du personnage de Daniel Plainview dans There Will Be Blood, le côté animal de Freddie Quell ou encore les cris de Doc.


Dans Phantom Thread, derrière la mondanité, le maniéré et le sophistiqué. On a des doses d'adrénaline en intraveineuse avec les séquences de voiture, de l'absurde par rapport à l'évolution de la romance et de la vulgarité.


Même le rapport à l'obsession du personnage est différent, en effet, cela est montré brillamment lors de la première scène où Alma a empoissonné Reynolds. Alma le voulait à elle toute seule et à son plus faible pour qu'il soit affectueux, et cela provoquera chez Reynolds de se confronter à son plus gros conflit intérieur : le manque de sa mère !


Il a toujours vécu avec elle et sa sœur (sa mère lui a d'ailleurs tout apprit concernant la couture), devant l'incapacité de ses femmes à se marier, il s'est lui-même refusé à être avec quelqu'un …


Le moment juste avant la première séquence d'empoissonnement symbolise d'ailleurs son obsession pour sa mère, ainsi que du contrôle de son art. Reynolds découvrira sur la robe une étiquette marquée " Never Cursed " (jamais maudit) et détruira la robe faisant en sorte de pouvoir enfin faire le deuil de sa mère pour commencer à voir Alma pour ce qu'elle est et pas un reflet de sa mère.


Lors de la scène où Reynolds fait son deuil, on peut voir une série de plans moyens sur la mère de Reynolds et de plan serrés sur Reynolds qui ne sont pas des champs-contre-champs, mais des face-à-face comme dans les conversations des films d'Ozu ou chez Wes Anderson, pour marquer le conflit intérieur de Reynolds, puis la caméra se rapproche, alors que Reynolds déclare à quel point sa mère le manque. Néanmoins, au moment où Alma arrive dans le cadre, Reynolds voit les deux femmes, pour finalement voir Reynolds se laisser aller et faire son deuil, symbolisé par le fait, qu'après avoir eu les deux femmes dans un même cadre, lorsqu'Alma revient dans le cadre, elle est seule et la mère de Reynolds ne réapparaitra pas !


Ensuite, nous verrons pour la première fois Reynolds privilégier Alma à ces robes en la réveillant et lui demandant sa main, tout ça avec un zoom où on passe d'un cadre où on voit la robe jusqu'à ne voir que Reynolds et Alma.


Maintenant que nous avons finit de parler de Reynolds parlons d'Alma, le début de sa relation avec Reynolds est marqué par le contrôle total de Reynolds : il prend sa commande pour voir si elle arrivera à s'en souvenir, il enlève son rouge à lèvres, il prend ses mensurations une fois chez lui comme pour prendre possession de l'ensemble de son être.


Pourtant, Reynolds reste à distance, on peut le voir via Johanna, sa précédente maitresse, qui en faisant du bruit, se fera massacrer par Reynolds (verbalement bien sûr) jusqu'à la pousser à partir, pour nous montrer le parallèle avec la relation entre Reynolds et Alma, car Alma fera la même erreur que Johanna et le même résultat arrivera, mais Alma ne se laissera pas faire et tiendra tête à Reynolds (ce qui contrebalance les premières scènes où elle est présenté comme passive).


En effet, Alma est loin d'être impuissante et n'hésite pas à montrer quand elle n'est pas satisfaite par la manière dont elle est traitée, où la manière dont les gens traitent le travail de Reynolds, notamment via la scène de la robe qui suivra un baiser passionné, sauf qu'Alma ira trop loin en lui avouant qu'elle l'aime ...


Cela avec la visite de la princesse qui la snobera, fera en sorte de mener au repas qui sera une catastrophe, qui mènera lui-même à l'empoisonnement de Reynolds (filmé comme Jack Nicholson dans Shining lorsqu'il demande à sa femme de sortir de la réserve, par une contre-plongée extrême avec la caméra posé à même le sol, sauf que là, la caméra est posé dans la soupe) pour le rendre plus calme et affectueux comme lorsqu'il a finit une de ses commandes !


Sauf qu'à chaque fois qu'Alma reprend le contrôle, Reynolds revient à ses habitudes pour finir ses commandes, au bout d'un moment, Reynolds devient si désespéré qu'il demande de l'aide à Cyril, déjà, car pour Reynolds, Cyril est la figure la plus proche d'une figure maternelle en plus d'être la véritable boss de la maison Woodcock.


De plus, Cyril a apprit à apprécier Alma (contrairement à Johanna qu'elle n'a pas du tout soutenue, mais a qui elle a quasiment ouvert la porte, pour qu'elle laisse Reynolds tranquille), car elle a une force de caractère qui est similaire à la sienne, d'autant plus que de tous les personnages, Reynolds ne s'attaque pas à Cyril et à raison, car au seul moment du film où il ose se confronter un tant soit peu à elle, Cyril le remet à sa place !


Elle est comme Peggy Dodd de The Master (sans la métaphore psychanalytique).


Elle perdra de son contrôle peu à peu dans le film, symbolisé à l'image par les fermetures de porte d'Alma pour prendre le contrôle de l'intimité de Reynolds, c'est Alma qui brisera la malédiction, car elle le forcera à se calmer et laisser tombé son obsession pour le contrôle !


Au final, personne n'a vraiment prit définitivement le rapport de force, mais la relation entre Reynolds et Alma a trouvé sa balance et perdurera !





La Réalisation





La réalisation de ce film est dans le prolongement de ce que Paul Thomas Anderson a fait avec Inherent Vice, plans bloqués (pour cette fois-ci marquer le côté figé de la bourgeoisie anglaise), peu de mouvements de caméras (à part lors de certains passages qui marquent des traits de personnalité cachés de Reynolds comme les séquences de voiture ou les élans plus passionnés), travail du cadre fournit avec des isolements pour ce Phantom Thread ou des plans marquant des rapports de force ou de conflits, pour parler du rapport de force dans le couple.


On a aussi de nombreux plans moyens de face, aux regards caméras forts rappelant beaucoup le cinéma de Jonathan Demme (à qui le film est dédié !), notamment avec le plan d'Hannibal Lecter dans le Silence des Agneaux qui est devenu culte !





Les Acteurs





Daniel Day-Lewis nous fait ses adieux en grande pompe avec ce Phantom Thread, après une carrière bien remplie, même s'il n'a pas joué dans tant de films que ça, il a à jamais marqué le cinéma en poussant la méthode à son paroxysme et on peut comprendre qu'en s'investissant autant dans le cinéma, c'est difficile de se relever et quitter son personnage !


Bref, Daniel Day-Lewis fournit une performance aussi bonne que dans There Will Be Blood, incroyablement juste avec ce personnage qui nécessitait tellement de finesse pour ne pas paraître trop absurde ou trop maniéré, en gérant ses conflits intérieurs.


Merci pour tout Mr. Day-Lewis !


Sinon, les deux autres femmes du film sont également interprétés par des actrices particulièrement talentueuses : Vicky Krieps et Lesley Manville !


Je ne l'ai avaient jamais vu dans un film au préalable, mais j'avoue que j'aimerais les voir plus souvent, toutes deux d'une grande justesse, jouant à merveille des femmes de caractère sans en faire trop, ce que je reproche à beaucoup de films voulant montrer des femmes émancipées et fortes, mais il y a une limite et Phantom Thread l'a trouvé !





La Musique





Si vous connaissez PTA, vous savez que son nouveau compositeur attitré n'est autre que Jonny Greenwood, qui délivre encore une fois, une excellente B.O, qui marque des événements de l'histoire comme la fameuse scène qui marque le milieu du film avec le morceau : Never Cursed.


On peut le voir aussi lors la reprise de pouvoir d'Alma via le morceau Phantom Thread II.


Les morceaux utilisés ont leur sens, à chaque fois que l'on entend certains thèmes, le choix est délibéré et sert soit à nous donner des informations supplémentaires ou à nous plonger dans les sentiments des personnages comme avec le morceau House Of Woodcock, qui est joué lors des séquences où Reynolds et Alma sont les plus passionnés.





La Conclusion





Pour conclure, Phantom Thread montre encore une fois tout le talent de son réalisateur et sa capacité à se renouveler et bien s'entourer, surtout par le choix de Daniel Day-Lewis, qui sort par la grande porte !

Créée

le 7 mars 2020

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Albator_Larson

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