On ne change pas une équipe qui gagne. Le tandem Hoss / Zehrfeld avait déjà brillé par leur prestation ambivalente dans Barbara. Il réitère dans Phoenix : drame plus violent et foudroyant que son aîné. Nina est rescapée des camps et revient chez elle, défigurée par un soldat nazi. Mais à son retour, elle se rend compte que son mari l’a trahie et qu’il ne la reconnait pas.

Petzold réitère les thèmes qu’il avait déjà traités, notamment dans Barbara. Puisque le rythme de sa narration est très lent, le tempo du film doit se situer ailleurs. C’est pourquoi toute son œuvre se bâtit sur ses personnages et leur ambigüité. Leurs motivations ne sont jamais palpables, mais toujours écrites avec une plume fine, qui vous fera douter jusqu’aux derniers instants. Leur relation, pleine de singularité, monte en intensité tandis que cette romance inavouée se lit un peu plus dans chacune des scènes.

Le thème musical, revenant sans cesse, est la clé de toute l’énigme. Plein d’intelligence et de subtilité, ce récit captive par ses non-dits, ensorcèle par un charme envenimé. Dans un univers à nouveau anxiogène, propice aux trahisons et aux faux-semblants, Nina Hoss est aussi splendide que fascinante. Sa capacité à camper un personnage troublé relève d’une performance de très haute tenue. Pas besoin de cris ni de pleurs pour montrer l’exaltation des sentiments. Les émotions les plus profondes se situent en nous, et l’interprète allemande le traduit à la perfection.

La question d’identité, primordiale après la Seconde Guerre Mondiale, est énoncée avec une justesse rarement perçue à l’écran. Nelly, femme blessée et délaissée, donnerait tout pour que son mari la reconnaisse. Il semble qu’il n’y ait qu’autrui qui puisse approuver et valider notre identité. Sans lui, nous ne sommes personne. Sans lui, nous n’existons pas.
Hugo_Harnois_Kr
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le 3 févr. 2015

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Hugo Harnois

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