Nanar au sang

Tant que le 3D est encore relativement nouvelle, il faut bien que les pionniers se singularisent par quelque innovation qui les positionne dans les développements de cette technique.

Alexandre Aja a trouvé: il a réalisé le premier vrai nanar en 3D.
Il n'y va pas avec avec le dos de la tronçonneuse: entre l'orgie étudiante de petits culs qui barbotent dans un lac, la complaisance à filmer des sirènes nues offrant leurs formes galbées aux appétits de monstres aquatiques, des piranhas vraiment haut de gamme, avec armure d'écailles style blindé d'assaut, une gueule d'alien à laquelle il ne manque que la mâchoire interne rétractable, la purée de chairs déchiquetées gluantes d'hémoglobine qui constitue le moment le plus attendu de l'opus, on ne peut pas dire que le cinéaste fasse appel aux sentiments les plus subtils de l'âme humaine.

De ce fait, il se moque de l'invraisemblance la plus choquante: comment des piranhas supposés préhistoriques ont-ils pu survivre des millions d'années sans s'exterminer radicalement, avec l'appétit qui les caractérise (puisqu'il paraît qu'il se mangeaient entre eux) ? Comment des abrutis, pardon, des personnages peuvent-ils conduire leur yacht droit sur des écueils, afin de donner aux piranhas des chances de petit déjeuner ? Entre vidéastes libidineux et nymphettes droguées et vêtues d'un timbre-poste, personne n'a atteint le niveau de conscience minimal qui leur permettrait de songer d'abord aux intérêts de leur propre survie.

Eli Roth - qui n'a pas intérêt à se compromettre plus avant dans des films d'une telle primarité - joue heureusement un rôle restreint. Elisabeth Shue, en fliquette désespérant de faire respecter la loi par une horde d'étudiants gonflés de bière et avides de baise, n'en fait pas trop pour jouer la mère de famille au secours de ses enfants opportunément perdus sur une île.

Pour le prochain 3D, qu'est-ce qui nous attend ? Un documentaire sur le toucher rectal ?