Avant de voir le biopic que lui a consacré Tim Burton, il me semblait important de me confronter au moins une fois au cinéma d'Ed Wood, le fameux pire réalisateur de tous les temps. Plan 9 from Outer Space avait l'air d'être la meilleure porte d'entrée vers son univers kitsch fait de bric et de broc. Et finalement, si tout le monde s'accorde à dire que ce long-métrage n'a aucune valeur esthétique, l’appellation "mauvais film sympathique" reste encore à voir.
Voilà le drame : je n'ai pas trouvé Plan 9 très drôle. Bien sûr, plusieurs éléments prêtent à sourire, comme les décors vides et parfois inexistants, les effets spéciaux dignes de films suédés, le jeu monolithique des acteurs (mention spéciale à Vampira qui reste cachée derrière son buisson pendant les trois quarts du film) ou bien encore la géographie des lieux qui n'a aucun sens. Mais dans l'ensemble on s'ennuie beaucoup, puisque Ed Wood se répète très souvent. Quand on arrive à la dixième apparition de soucoupe volante, au vingtième faux-raccord jour/nuit, au trentième plan sur Bela Lugosi qui sort de la forêt, on commence à en avoir marre. Il n'y a pas une surenchère de stupidité comme celle de Turkish Star Wars (même si ce dernier devient irritant vers la fin) pour constamment relancer l'intérêt. En plus, le rythme est assez lent et impose de longues scènes d'exposition inintéressantes. Plan 9 tient donc plus du film raté que du nanar pur et dur.
Et quand je dis raté, ce n'est pas pour rien, parce que Plan 9 transpire le plaisir et l'envie de bien faire. Bon, cela vient peut-être du fait que je connais un peu la vie d'Ed Wood, mais j'ai trouvé ce mélange d'extraterrestres et de morts-vivants attendrissant tant il évoque un rêve de gosse. Il en va de même pour la récurrence de l'effet de brume, des stock-shots ou des maquettes de soucoupes, utilisés sans aucune parcimonie, comme si le réalisateur s'était dit avec insouciance que ça passait sans problème. Enfin, il y a bien sûr les nombreux plans sur Bela Lugosi, mort pendant le tournage, que Wood a mis dans son film, par amitié pour lui, au mépris de toute cohérence scénaristique. Si c'est pas beau...
Plan 9 a donc marqué les esprits pour être apparu à une époque ou les films très kitsch et très pauvres formellement n'étaient pas très courants. De nos jours, son intérêt nanadesque est assez limité, mais les intentions d'Ed Wood sont bel et bien sincères, et le film reste un incontournable dans le parcours d'un cinéphile.