Désolé je n'ai pas trouvé de titre plus respectueux de mon impression générale que ce mot qui peut sembler convenu mais qui pourtant fait irradier autour de lui une sphère de sens convoquant à la fois au beau et au merveilleux pour le versant plus onirique.
Pourtant, rien ne me prédestinait à aimer ce film avant de le visionner : actrices très connues (voire m'insupportant), style fastueux..bref je m'attendais à une espèce de copie de film Hollywoodien se voulant porteur d'un message mais étant profondément niais et convenu dans le fond. Du coup, j'ai non seulement été surpris mais aussi pris à mon propre jeu d'anticonformiste puisque je suis sorti de la salle avec un sentiment positif qui n'a cessé de grandir et avec cette marque étrange qu'a imprimé cette oeuvre qui -semblable à ces femmes que l'on croit "superficielles" en les voyant mais qui ne le sont pas - révèle des trésors derrière le fard.


Ce qui m'étonne le plus est que si j'essaie de me raccrocher à ma Raison, je sens que quelque chose cloche dans ce film ; de même, si j'essaie d'interroger mon pôle émotionnel primitif, je ne saurais en retirer une grande intensité rémanente. Malgré cela, j'ai ressenti que le film s'est emparé de moi et qu'il entrait en dialectique avec mon humanité.
En somme, Planetarium est une des ces oeuvres que l'on pourrait appeler réflexives au sens le plus originel et passif du terme, un film tel un miroir inerte qui produit la même sensation que celles que l'on ressent parfois en observant un paysage de nuit du haut d'un toît en cadrant avec ses doigts pour couper ce qui gêne notre vue. Nous sommes ainsi plongés dans un spectre idéal de la réalité comme si nous étions en train d'utiliser consciemment le prisme qui fait la jonction entre la réalité sensible (au sens physique du terme) et le monde vécu.


En réalité, ce film n'entre pas dans les catégories les plus fréquentes que sont les récits et les films à message, ni même encore dans la petite classe des peintures sociales ; il s'agit plutôt de rien de ceci dans le fond et d'un peu de tout à la fois dans la forme.
Avec sa thématique à la lisière du fantastique et du rêve et sa peinture de destins divers, on pourrait ranger ce film dans les catégories du conte ou de la fable mais avec son implacable neutralité Planétarium échappe à ces stéréotypes et devient une oeuvre singulière mais pourtant pas révolutionnaire.
En réalité, Planetarium est tel le lieu dont il porte le nom, une bête et petite bâtisse qui contient une représentation de l'infini, cet infini où peuvent se perdre les rêves et les projections. Avec sa mise en abîme (le film dans le film, et pas n'importe quel type de film, le film ancien qui par sa forme nous rapproche de son sujet du fait qu'il nous éloigne de la réalité), le film crée une sorte d'harmonieuse dissonance entre le fantasme et la réalité. Sans chercher de sens à ce film - ce qui serait vain car il est inutile d'expliquer ce qui nous parle sans avoir à verbaliser, puisque Planetarium s'exprime davantage par sa sensibilité et sa composition en direction des couches profondes de l'humanité (intuition, instinct)...pourquoi expliquer et donc détruire ce qui nous parle instantanément si on sait écouter ? - on retrouve néanmoins en fil rouge une matérialisation artistique de ce prisme qui nous relie au monde et donc je parlais plus en haut. Dans ce cinéaste qui voulait voir plus que ce qu'il pouvait voir, de cette bulle dorée que crée le film (à la fois le vrai et le fictif) masquant et créant même le désintérêt du spectateur pour la réalité politique.


Critiquer Planetarium au fond, c'est presque comme essayer d'expliquer ce que l'on ressent quand l'on est sujet à une intuition ou à un rêve, c'est comme couper le lien à la cave qui se tapit au coeur de notre édifice. Pourquoi vouloir expliquer l'inexplicable ? Pourquoi vouloir déconstruire cette unicité pour la reconstruire dans la sphère du conscient toute trahie ? J'ai lu que le film s'égarait de toutes parts, ne s'engageant vraiment dans aucune voix. Et c'est là en réalité l'erreur car pour ressentir ce film, il faut suivre le conseil du réalisateur quand il demande à Natalie Portman ou quand Korbin s'adonne à ses séances avec ces dames : il faut "lâcher", dans le sens que l'on comprend sans que l'on ait à l'expliquer, comem ces gros plans furtifs sur des objets à certains moments du film qui n'ont pas de symbolique apparente mais qui saississent dans le même mouvement.


Il n'y a ni message, ni secret dans Planetarium, juste une fenêtre portée vers l'humanité universelle au sens "métapsychique". Et c'est peut-être en cela qu'il fait la nique aux codes qui régissent notre persona qu'il égare allègrement. Comment faire avec un film que l'on ne peut saisir et qui nous saisit pourtant ? Comment faire pour interpréter cette foule de détails que l'on ne peut organiser, classer, synthétiser et qui pourtant s'aggrègent naturellement en une plongée incroyable dans les contrées lunaires de notre bâtisse ?


De loin le meilleur film que j'ai vu cette année et un des très rares films qui n'ont ni été obligé de provoquer une suractivité psychique (j'adore me tordre l'esprit) ni de me faire sombrer dans une émotion primitive intense pour me faire penser "putain, en fait c'était quand même un film de malade !"


Chef d'oeuvre

Foulcher
9
Écrit par

Créée

le 17 nov. 2016

Critique lue 609 fois

4 j'aime

Foulcher

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