Un petit bijou aussi beau (visuellement bluffant) qu'intelligent. Si le titre et le synopsis nous faisaient faire grise mine, le visionnage au petit bonheur nous a fait découvrir un film haut en couleur. Le travail sur le noir et blanc est déjà brillant en soit, et le film y incorpore un jeu sur les touches de couleurs qui est toujours surprenant et nous ramène, nostalgiquement, au fondement du cinéma... Les acteurs sont vraiment bons respectivement dans leur rôle : Tobey Macguire est crédible en jeune homme refoulé par la société conformiste, qui va trouver sa place en libérant du carcan social une autre communauté encore plus encline aux mœurs que la sienne... Et pour cause : cette société est fictive, il s'agit d'une émission télé dans laquelle ce jeune homme est propulsé avec sa sœur accro au sexe (Reese Witherspoon dans un rôle de rebelle qui lui va si bien !). On rit souvent de voir le côté "fictif" de Pleasantville (le monde parallèle) : pas de WC, des personnages incapables de la moindre initiative personnelle, ou de sortie de routine... Puis on voit poindre la merveilleuse critique dissimulée du racisme : les "colorés" ("colored" étant en anglais le même mot ségrégationniste utilisé pour les "Noirs") sont discriminés et chassés, avec un maire particulièrement vindicatif et protecteur du " peuple parfait "... La critique est rudement bien menée et très claire. Les apparitions progressives des couleurs sont magnifiques et ont demandé un travail titanesque (chaque pétale des cerisiers qui s'envole a été colorisé sur le fond gris du ciel !), la musique est impeccable et nostalgique à souhait, la critique du racisme est parfaite par sa métaphore qui donne une légèreté agréable au récit, les acteurs sont fabuleux, et la fin fait progresser chaque personnage (et nous avec). Un bonheur, un film (vraiment) très "pleasant" !