Esthétique, glaçant, prenant. Voilà comment on pourrait résumer Polytechnique, troisième long-métrage de Denis Villeneuve qui traite d'un sujet délicat, mais qui revient de plus en plus dans l'actualité : les tueries scolaires.
L'introduction du film est magistrale. Au début anodine, à savoir deux étudiantes en train de papoter devant une photocopieuse. Bon, comme je ne comprends pas tout ce qu'elle disent, j'augmente le son. Erreur, le son était bien réglé. Car la scène suivante commence par un coup de feu assourdissant me propulsant au fond du canapé. Une femme est touchée à l'épaule, une autre à l'oreille et déambule sans repères dans un couloir. Générique. Voilà comment poser un film.
Après environ 25 minutes de mise en place -un peu longues-, l'action débute. Marc Lépine (l'auteur de la tuerie), débarque dans une classe où ils demandent aux hommes et aux femmes de se séparer. Sachant au préalable ses motivations, à savoir tuer le plus de femmes possible, on ne sait pas encore ce qu'il va se passer, même si on le devine fortement.
On suit alors le tireur, d'un calme terrifiant, dans sa folle quête à travers l'école Polytechnique de Montréal. Il fera au total 14 victimes, toutes féminines, et en blessera 14 autres (dont 4 hommes) avant de se suicider.
La réalisation, qui alterne entre flash forward sur la vie des rescapés après le drame et retour à l'action, est assez efficace pour montrer le choc de cet évènement au Québec, car appuyant sur la détresse des survivants, les poussant jusqu'au point de non retour.
La caméra suit au plus près les protagonistes dans le but évident de nous plonger au cœur de l'action, et c'est très réussi. L'usage du noir et blanc contraste justement avec cet aspect et est pour moi un réel avantage, évitant d'assister à un bain de sang constant qui aurait sans doute été trop choquant, même 26 ans après. La photographie est très belle, certains plans frôlent la perfection.
Côté acteurs, je retiens Maxim Gaudette (Marc Lépine), un peu moins les autres acteurs Karine Vanasse (vue dans Revenge notamment) et Sébastien Huberdeau dans un rôle particulier, du "bon samaritain" comme on pourrait dire.
Néanmoins, un point me gêne avec ce film, le dernier message qu'il délivre quand le personnage de Karine Vanasse apprend qu'elle est enceinte : "si j'ai un fils, je lui apprendrais l'amour, si j'ai une fille je lui enseignerais que le monde lui appartient". Cette réplique est pour moi contre-productive car elle va à l'encontre de ce que dénonce le film. Si l'on pense comme cela, des drames similaires pourraient justement se reproduire. C'est assez maladroit comme conclusion, et dommage de rester sur cette fausse note.
Néanmoins, je recommande ce film, car il reste intéressant pour de nombreuses raisons et il ne vous prendra qu'à peine 1h15 minutes de votre temps.