Les gros plans n'existent pas dans le cinéma de Roy Andersson. Comme dans ses trois longs-métrages précédents, ce sont les plans fixes qui sont la norme au gré de saynètes qui se succèdent, très courtes, avec des personnages figés comme dans un tableau qui s'animent (un peu), avec un commentaire succinct en voix off (une première chez le réalisateur suédois). De quoi s'agit-il au juste ? De notre (in)humanité toujours, de tranches de vie saupoudrées d'humour, de sens de l'absurde, de cruauté et de mélancolie. Du bunker d'Hitler à une femme qui casse un talon, en passant par un prêtre qui a perdu la foi, les différentes vignettes exposées par Andersson ont en commun une poésie désuète et diffuse, dans des décors où dominent des teintes marrons ou grises. L'exercice ne manque pas d'allure, comme toujours avec ce cinéaste atypique et philosophe, mais celui-ci n'est manifestement pas au meilleur de sa forme : le film est inégal, pas très drôle, anodin même souvent et loin d'atteindre le niveau du Pigeon perché sur sa branche ou Chansons du deuxième étage, deux de ses opus antérieurs. Reste qu'un film de Roy Andersson est surtout une question d'humeur et de réceptivité, celles du spectateur, s'entend, et que ses films, à l'instar de ceux de Suleiman, Hamer ou Van Warmerdam, par exemple, sont infiniment précieux par leur refus d'emprunter des sentiers battus narratifs et leur regard désabusé et perçant sur la condition humaine avec une question centrale : Y-a-t-il une vie avant la mort ?

Cinephile-doux
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le 1 mai 2020

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