Après le torture-porn, genre prôné par Jigsaw et sa marionnette enfantine, voici le social-porn. Imaginez tous les malheurs du monde qui s'abattent sur une seule personne: Precious, enceinte de son deuxième enfant dont le père n'est autre que son père, martyrisée par sa mère qui lui lance des casseroles sur la tête, analphabète, obèse et pour couronner le tout, elle vit dans la misère ne subsistant que grâce aux allocs de sa mère. En clair, la VDM maîtresse de toutes les VDM. Pas besoin d'expliciter, il suffirait d'écrire : « Mon nom est Precious, VDM ! » et elle recueillera pleines de validations de VDM (y aura juste quelques enfoirés pour cliquer sur « Tu l'as mérité »).

Ceux qui crient haut et fort que le film en fait trop. Ce serait ne faire que l'apologie de leur bêtise, de leur ignorance car la situation sociale dans les ghettos est loin d'être reluisante surtout dans les favelas ou les coins les plus reculés d'Afrique ou d'Asie.

Surtout ce qui marque avec ce film, c'est la façon dont il évite de tomber dans la surenchère pure et dure, pour nous forcer à tirer les larmes. La Precious, malgré tout ce qui lui arrive, reste digne et tente toujours de s'en sortir via l'école. Une belle leçon de vie pour nous tous, cette jeune fille nous prouve qu'il reste toujours un espoir même au fond du trou.

Un excellent drame servi par une réalisation un peu atypique rappelant beaucoup les séries policières The Wire et The Shield. A savoir une utilisation d'un grain prononcé et de légers zoom rapides pour appuyer (voir forcer) l'attention du spectateur. Ça déroute un peu par rapport aux standards hollywoodiens mais il faut rappeler que Precious est un film indépendant. S'il a connu une aussi grosse médiatisation, il le doit beaucoup à Oprah.

Au delà de la bonne performance de l'actrice principale (rien d'extraordinaire non plus), c'est principalement celle de Mo'Nique (jouant le rôle de la mère de Precious) qui subjugue. Pas besoin de mots pour l'expliquer. C'est encore plus surprenant en regardant la filmographie de cette actrice habituée aux comédies et aux nanars, ce serait un peu comme si Vincent Lagaf' jouait le rôle principal de Le Pianiste.

L'apothéose survient durant La confrontation finale entre Mo'Nique et sa « fille », un moment d'émotion pure et d'horreur absolue (vous pensez avoir touché le fond avec les tortures physiques et sanguinolentes de Saw, imaginez l'équivalent mais moralement). En plus les descriptions de Mo'Nique sur les sévices subies par Precious sont à glacer (c'est simple, j'ai du regarder un sitcom après pour me changer les idées sinon je ne dormais pas). On comprend aisément l'Oscar attribué à Mo'Nique et il ne souffre d'aucune contestation.

Pour l'anecdote, il faut savoir que l'actrice Mo'Nique a été abusée par son frère pendant huit ans et a avoué s'être servi de ce film comme thérapie.

Deuxième surprise, le rôle de Miss Weiss, l'assistance sociale. Alors qu'Helen Mirren devait prendre le rôle, elle se désista au dernier moment et le rôle fut donné à Mariah Carey. Une catastrophe ? A ma grande surprise, non. M'enfin, il faut dire que je ne l'ai même pas reconnu. J'ai dû attendre le générique de fin pour voir à quel personnage correspondait l'actrice. Je fus stupéfait en apprenant qu'il s'agissait de Miss Weiss. Une belle performance de sa part et il faut le signaler vu le nombre de chanteuses qui foirent totalement le passage au grand écran (remember Britney Spears, Jennifer Lopez, Christina Aguilera).

Pour terminer, je tenais à parler de la réalisation qui joue aussi beaucoup sur l'imaginaire de Precious avec des belles scènes qui ne sont pas sans rappeler les délires psychédéliques de Tommy (l'opéra rock des Who). Une scène absolument magnifique au zénith : celle où la caméra tourne autour de Precious laissant voir les plus grands passages de l'histoire Afro-américaine à base d'images d'archives juxtaposées.
Marvelll
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le 9 nov. 2011

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