Les jumeaux Spierig ont réussi à se construire une belle petite identité de réalisateurs indépendants. Ne comptant pour l'instant que quatre films à leur actif, dont un totalement méconnu, ils sont parvenus à marquer une petite fraction d'amateurs de cinéma indépendant de par leurs penchants pour les genres fantastique et science fiction. Predestination, leur dernier en date, ne leur permet tout de même pas de bénéficier de promotions efficaces et suffisamment étendues pour accroître leur notoriété, malgré la présence d'Ethan Hawke pour le rôle titre, ce qui est fort dommage.

Predestination renoue les liens avec le voyage temporel. De par son synopsis, tout spectateur néophyte en ce qui concerne la carrière des frères Spierig, pourrait s'attendre à un ersatz de Looper, il y a d'ailleurs une comparaison entre les deux. Le concept est quasiment le même de toute manière et un visionnage s'avère donc indispensable pour connaître les fins de ce Predestination.

Les premières minutes ravissent. Le spectateur assiste à une succession de flashbacks digne des techniques de Nolan. Un rapprochement avec le cinéaste est d'ailleurs inévitable sur la majeure partie du film, tant par son contenu, son montage que sa bande originale. Cela sent malgré tout le budget modeste mais il est indéniable que tout l'aspect technique en fait un important atout du film. Cependant, Predestination peut en dérouter un bon nombre. En effet, au-delà des premières minutes qui mettent littéralement l'eau à la bouche, le spectateur assiste ensuite à une sorte de récit autobiographique, empli de clichés, pesant lourd sur la courte durée générale du film. De plus, la majorité des dialogues a de quoi susciter tout discrédit de la part du spectateur. C'est long, banal et affreusement répétitif.

Arrive la dernière partie, heureusement, bien plus attrayante. L'action prend forme mais le spectateur ne parvient toujours pas à savoir où le film veut en venir. L'intrigue dévoile enfin ses vérités lors des dernières minutes. Un coup de théâtre final qui a de quoi en étonner plus d'un. Tout prend soudain forme, se justifie enfin et donne du sens à tous ces sous-entendus, aussi banals soient-ils. Le ressenti général change et le spectateur se voit prendre un engouement tel que toutes ces minutes subies laborieusement sont prises en compte avec une toute nouvelle considération, un véritable enthousiasme.

Predestination a donc pour ma part supprimé tout un amas de reproches à son égard pourtant justifiés en l'espace d'un minuscule instant, pour faire naître en moi un véritable emballement. Il s'agit donc d'une réelle surprise pour un film qui était pourtant très mal parti. Les frères Spierig ont relevé leur défi haut la main avec ce thriller de science fiction totalement opposé à l'image qu'il véhicule, un voyage dans le temps qui joue avec les codes actuels de "l'intrigue à tiroirs", manipulant avec ferveur et fantaisie tout amateur de bonne science fiction.

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le 13 janv. 2015

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langpier

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