Avis aux lecteurs cinéphiles : il se peut que cette brève critique dévoile certains éléments du dernier film de Denis Villeneuve, au point d'en gâcher la découverte. Si vous êtes vierge de toute information n'hésitez pas à quitter cette page pour mieux apprécier le spectacle dans une salle obscure, et revenir me lire par la suite. Bonne projection !


Un film sublime. Cela faisait longtemps qu'un film de science-fiction n'avait pas transcendé le genre, au point de littéralement bouleverser son audience. Situé à mi-chemin entre le cinéma méditatif de Andreï Tarkovsky ( on pense à Zerkalo pour l'émotion et les différentes strates temporelles, à Stalker pour la fonctionnalité des personnages principaux...) et Rencontre du troisième type pour l'aspect purement narratif Premier Contact s'agit certainement du meilleur film de son auteur, du moins l'un des plus ambitieux dans son propos et l'un des plus aboutis dans sa maîtrise.


S'amusant à jouer avec les différents genres d'un film au suivant Denis Villeneuve opte ici pour le happening extraterrestre. Moins une fin en soi qu'un prétexte à livrer une élégie poignante sur l'existence et la malléabilité du temps les heptapodes de ce joyau cinématographique sont les outils susceptibles d'étayer la thèse de Villeneuve. Le cinéaste n'a pratiquement jamais recours au spectaculaire gratuit et fanfaron, et utilise intelligemment ses effets spéciaux au point de rendre son film davantage intimiste voire introspectif. Ainsi le spectateur s'identifiera clairement au personnage de Louise ( Amy Adams, magnifique et à fleur de peau ), linguiste en quête de vérité et d'amour...


Denis Villeneuve livre ainsi une réflexion pratiquement inédite sur le temps et sur son emprise sur l'être humain, l'associant de manière limpide et édifiante à la structure d'un langage extraterrestre, à la fois atemporel et totalement réversible. Nous sommes loin d'une vision parfois matérialiste d'une flèche du temps ou d'une projection exclusivement cérébrale du temps-horloge. Ici le réalisateur parvient à dépasser son sujet non pas en s'attardant trop sur l'espèce énigmatique formée par les heptapodes mais en signant une histoire d'amour pleine d'amertume non dénuée d'optimisme dans le même mouvement. Passé, présent et futur ne seront donc qu'une seule et même réalité pour l'héroïne, héroïne sublimée par la caméra fluide et inspirée de Villeneuve. Chef d'oeuvre de l'année 2016.

stebbins
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le 16 nov. 2019

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stebbins

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