Prometheus : quand la saga Alien rencontre 2001 !

Avec The Dark Knight Rises, Prometheus était l'un des deux films les plus attendus de l'année ! Depuis des mois et des mois, médias et blogs se posaient la même question : Prometheus était-il oui ou non une préquelle d'Alien, le Huitième Passager ? Un secret bien gardé jusqu'à la diffusion de ce fameux Teaser renfermant un plan inédit du Space Jockey. Son réalisateur Ridley Scott assurait dans les interviews que Prometheus n'était pas une préquelle d'Alien mais en comportait l'ADN. Après vision du film, Prometheus est en réalité un film hybride. Il est à la fois une préquelle d'Alien qui revient aux origines du Space Jockey, la mystérieuse race extratererestre rencontrée par l'équipage du Nostromo sur la planète LV-426, mais aussi un film autonome, dont le récit s'étend bien au-delà de la saga Alien. Il s'agit pour l'équipage de scientifiques partis à bord du vaisseau Prometheus à destination de la lointaine planète LV-223 de tenter de percer le secret des origines de l'humanité. Un voyage aux confins de l'univers censé répondre à nos questions existentielles les plus profondes. Si Prometheus conserve en toile de fond le mythe Alien, un autre mythe bien plus vaste se dessine en prolongement, une épopée sur l'Homme, Dieu et la Création.



Alien en héritage

Ridley Scott a mis la barre très haut au risque de s'y perdre lui-même et surtout de perdre le spectacteur en chemin. Un chemin infini qui au final pose plus de questions qu'il n'apporte de réponses. Quand certaines critiques font part leur immense frustration et déception à la vue du film, d'autres au contraire parlent déjà d'une oeuvre culte en devenir, d'un chef-d'œuvre en puissance. Un juste milieu s'impose. Ces réactions passionnées étaient finalement prévisibles, tant l'attente était grande, trop grande sûrement. Prometheus est au final un film déroutant. Dès les premières images du film, nous voilà plongé dans un univers de science-fiction métaphysique sans pareil. Ridley Scott n'a pas perdu la main et s'efforce de nous proposer un spectacle encore jamais vu, quelques chose de différent, d'à la fois étrange et terrifiant. Prometheus reste connecté avec l'univers dont il fait référence. Loin de faire du recyclage, Ridley Scott inscrit Alien en héritage de son sujet. Certains auraient pourtant voulu que son réalisateur fasse un choix. Faire de Prometheus une œuvre complètement indépendante, détachée de sa matrice originelle et assumée en tant que telle, ou bien une « vraie » préquelle au premier Alien avec des xénomorphobes et des facehuggers intégrés au récit. Prometheus n'est ni l'un ni l'autre et échappe à la catégorisation rassurante et à l'étiquettage simpliste, dont certains ont un besoin viscéral pour ne pas avoir le sentiment que 'l'objet film » leur échappe.

Un spectacle « biomécanique »

Avec Prometheus, Ridley Scott confirme une nouvelle fois son immense talent de formaliste. Le film est beau visuellement et esthétiquement. Une beauté horrifique j'entends, qui trouve son inspiration démentielle avec le peintre designer suisse H.R. Giger, déjà présent sur le premier Alien. Mélange d'organique et de mécanique, le genre « biomécanique » de Giger trouve avec Prometheus sa forme d'expression la plus absolue au cinéma. Hormis des décors hypnotisants, de nouvelles espèces de monstres, aussi terrifiantes les unes que les autres, parsèment le film. A l'instar de la forme phallique du crâne de l'Alien adulte dans le film original, Prometheus n'est pas non plus avare en connotations sexuelles poussées. A l'instar du pornographique Urostsukidoji, les monstres tentaculaires de Prometheus violent aussi leurs victimes avec leurs « organes sexuelles ». La violence graphique atteind son paroxisme dans l'une des toutes dernières séquences de Prometheus, dont un gros plan rappelle celui du monstre final de Starship Troopers. Pas toujours heureux dans sa collabation avec Hollywood, Giger peut enfin avec Prometheus s'enorgueillir d'avoir su introduire ses visions cauchemardesques et ses obsessions sexuelles à l'intérieur d'une des plus grandes franchises de SF horrifique que le cinéma n'ait jamais connu.

« Le visage de Dieu »

Concernant les personnages, la scientifique opiniatre et croyante Elizabeth Shaw (Noomi Rapace) et l'androîde David (Michael Fassbender), sosie de Peter O'Toole dans Lawrence d'Arabie, sont les plus marqués. Le chemin de croix vécu par Elizabeth Shaw dans Prometheus évoque forcément celui de Ripley (Sigourney Weaver) dans Alien. Si Shaw et Ripley n'ont que peu de point commun, elles finissent par se retrouver dans leur formidable et inaltérable instinct de survie. Avant d'embrasser « le visage de Dieu », la foie de Shaw sera mise à rude épreuve. Par ailleurs, si à l'instar de Bishop (Lance Henriksen dans Aliens, le retour) et Call (Winona Ryder dans Alien, la Résurrection), le robot David possède une apparence humaine, son profil se rapproche surtout de celui de l'androîde Ash (Ian Holm) dans Alien, le huitième passager. Bien que l'androïde David, personnage complexe aux réactions imprévisibles, soit de nature différente de Shaw, il possède comme elle un « créateur ». Et si Shaw cherche à savoir pour quelle(s) raison(s) les « ingénieurs » ont crée l'Homme puis paradoxalement ont voulu ensuite l'anéantir, l'androïde David quant à lui sait expliquer pourquoi l'être humain l'a créé, lui : « Parce qu'il le pouvait ! ». Comment ne pas faire de lien avec un autre film de Ridley Scott, Blade Runner, dans lequel le personnage du réplicant Roy Batty (Rutger Hauer) organise avec les siens la quête de ses origines. Dans Prometheus, Shaw apprendra à ses dépens que les mystères de la création sont comme les voies du Seigneur : impénétrables.

Les origines de la création


La question des origines est au coeur de Prometheus. Les origines de l'homme d'une part et celles de l'Alien d'autre part. Le Space Jockey, nouvellement appelé « Ingénieur », est le chainon manquant se situant au centre de cette équation (infinie ?). Et plutôt que de recoller les morceaux d'un puzzle horrifique entamé en 1979 avec Alien, Ridley Scott préfère au contraire y ajouter de nouvelles pièces renfermants chacunes des mystères encore plus grands. L'énigme « Prometheus » comme réponse à l'énigme « Alien » ? Il ne pouvait en être autrement avec Damon Lindelof, le scénariste de Lost, les disparus (Lost) et de Cowboys et Envahisseurs (Cowboys et Aliens), passé maître dans l'art d'entraîner le spectacteur dans un labyrinthe d'énigmes, de fausses-pistes et d'intrigues alambiquées. On accepte ou pas de s'y perdre. Avec Lindelof à l'écriture, Ridley Scott a finalement fait se rencontrer l'horreur d'Alien avec le métaphysique 2001 : l'odyssée de l'espace de Stanley Kubrick. C'est dire à quel point Prometheus ne peut laisser personne indifférent. Après être devenue une vulgaire série B de SF sans grande ambition avec les deux crossovers d'Alien Vs. Predator, la saga Alien reprend du poil de la bête avec Prometheus, et retrouve intacte l'ampleur et l'ambition des quatre premiers films, d'Alien le huitième passager à Alien, la résurrection de Jean-Pierre Jeunet.
Cinextreme
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le 3 juin 2012

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