http://www.youtube.com/watch?v=0fKBhvDjuy0

Ne m'en voulez pas, j'aime bien les pique-niques avec mon amoureuse. C'est pas kitsch, c'est vraiment bien. Et puis faire la sieste dans l'herbe, tranquille, alors qu'on est au milieu d'une grande ville folle, pleine de routes et d'immeubles, ça me va, je vois pas qui cracherait là dessus. Donc, après des millénaires de lutte fatiguée contre les éléments, de loi de la jungle et de tueries inutiles pendant des générations, on se retrouve là, sous un petit vent frais, la main posée sur le ventre, un peu repu, prêt à revisiter en rêve le doux sourire de l'être aimé dont la chevelure nous chatouille les côtes.

Personnellement, je n'ai jamais mesuré plus de 182cm. Mes pieds, eux, ne sont jamais partis à plus d'un vol d'avion de la surface de la Terre. Jamais mes yeux myopes ne transperceront la surface de ma main pour y sonder des électrons. D'ailleurs ces yeux sont eux-mêmes pleins d'interaction électriques et de noyaux atomiques, aussi noyés dans le bouillon de particules élémentaires que les innombrables amas galactiques inaccessibles à leur regard. Mon corps infime reste dans les couleurs tangibles du pique-nique, des visages et des conversations.

Et pourtant, le cinéma existe, suspendu entre deux néants.

En à peine dix minutes, Power of Ten déroule devant nos yeux le résultat d'une exploration séculaire, enquête toute neuve et fragile devant l'immensité de son objet. Faute d'en vivre un jour le voyage, on ne pouvait qu'imaginer ce film. Qu'à cela ne tienne, les images existent, elles nous parlent. Il en résulte une merveille de concision, d'une émouvante simplicité.

Quant à moi, j'aime les pique-niques avec mon amoureuse. Et la traversée de l'univers entier laisse inexpliquée cette heureuse faculté d'être là.