Et mon intérêt avec lui. Il s'en est allé doucement, sur la pointe des pieds. Mais ce n'est pas la faute de Nicolas Winding Refn. Non. Sa caméra portée fait des merveilles en collant aux basques de Frank et dans le sillage d'un réalisme rêche et sans fard. La qualité de ses compositions et de ses jeux de lumières surprennent et impressionnent parfois. Les éclats subits d'une violence sèche et à fleur de peau se chargent quant à eux de signifier qu'il n'y aura aucun glamour dans sa représentation. Nous sommes au Danemark, pas aux Etats-Unis.
Ce n'est pas la faute des acteurs. Au contraire. Kim Bodnia fait son affaire de la descente aux enfers de son personnage. Lui qui était pourtant si cool et à l'aise au début avec son comparse Mads Mikkelsen, toujours nickel lui aussi. Mais le moment où il tire sa révérence au fond de ce bar semble emporter une partie du film avec lui, contrepoint intéressant et déjanté. Laura Drasbaek, quant à elle, son personnage est suffisamment paumé, fragile et dépendant pour susciter l'empathie et la compassion.
Ce n'est pas la faute du scénario, aussi classique soit-il, jusque dans une dernière partie qui refuse obstinément les compromis et qui fait rebondir l'attention. Comme la musique de Peter Peter. On comprend que Frank n'arrivera pas à sortir la tête de l'eau et on comprend pourquoi le film semble tourner en rond, comme pour figurer que son "héros" regarde dans toutes les directions possibles afin de trouver une porte de sortie inespérée et mettre ainsi fin à sa fuite en avant. Comme un surendetté qui contracte des prêts pour rembourser ceux qu'il a déjà sur le dos, Frank tire sur toutes les ficelles possibles mais s'enfonce lentement jusqu'à ce que son créancier le rattrape.
Non, tout cela, c'est de la faute du personnage principal. Car on assiste à sa déchéance sans le plaindre pour autant. Aucun lien ne se tisse avec le spectateur car il ne s'agit, au final, que d'une petite frappe. D'un minable qui s'y est mis dedans tout seul et qui use de sa petite influence pour tyranniser et rançonner plus minable encore que lui. On ne suit que de loin ce qui lui arrive et ce qu'il traverse. Et on se dit au final qu'il l'a bien cherché. Même dans ses moments les plus intimes, sensés être la possibilité de faire enfin tomber le masque, rien, finalement, ne traverse le coeur du spectateur. Car ce qu'il retiendra, c'est sa violence, son absence volontaire de contact avec sa mère ou sa plus ou moins compagne, qu'il ne viendra voir que par intérêt ou parce qu'il en a quelque chose à tirer.
Et là, Nicolas Winding Refn aura beau faire étalage de ses grandes capacités, pour moi, il n'y aura pas grand chose à faire. Car mine de rien, un personnage auquel on peut s'attacher, cela fait toute la différence. Et malheureusement, dans ce Pusher là, il n'existe pas.
Mais bizarrement, l'envie de voir les deux autres films de la trilogie est là. pour voir développer ce qu'on nous montre avec parcimonie des personnages de Milo et Tony. Mon coffret DVD restera donc pour l'instant ouvert.
Behind_the_Mask, qui a rendez-vous chez le vétérinaire.