"Toutes les grandes personnes ont d'abord été des enfants. Mais peu d'entre elles s'en souviennent."

C'est un film où l'on commence par écouter, car n'est pas ce qu'est le souvenir, où tout est sensation et perception? D'ailleurs, tout au long du film, la bande son, nostalgique et mélancolique, est très peu présente, ou bien seulement ponctuant quelques instants bien précis, donnant ainsi au récit une profondeur dramatique et la présence de l'Adagio d'Albinoni n'enlève rien à l'intensité de la tragédie qui se joue et à toute la question que pose ce film: que dire aux enfants de la douleur de la vie, le passé doit-il rester ce qu'il est?


Plus encore, ce film est l'histoire d'une enfance trahie par les adultes, malmenée par les sentiments et les espoirs de chacun. C'est l'histoire d'un désir de préserver cette enfance, encore fragile et heureuse dans son innocence, innocence perdu par les adultes, âge envié par tous, ce qui semble expliquer le souci attaché par chacun à sa protection. Ce film pourrait presque être un rêve, un songe où Matthias revit son enfance pour mieux se souvenir de ce père trop vite parti, arraché à son souvenir par son absence dans les derniers moments. Je comparerai volontiers ce récit avec celui de Marcel Pagnol dans ses souvenirs d'enfance: ici aussi, il est question de mensonge, et de cette envie de laisser les enfants en dehors de la tristesse du monde.


Dans Quand je serai petit, le jeune garçon demande à Matthias:
- "pourquoi tu mens?
-parce que tu es grand tu mens tout le temps".
Sa mère refuse de lui dire que son père est gravement malade, voir dans les derniers instants de sa vie.


Les mêmes thèmes sont abordés chez Pagnol. Dans la Gloire de mon Père, un même constat peut être fait:
"De plus, je découvris ce jour-là que les grandes personnes savaient mentir aussi bien que moi, et il me sembla que je n'étais plus en sécurité parmi elles".
Dans le Château de ma Mère, l'auteur tire cette conclusion dramatique: "Telle est la vie des hommes. Quelques joies, très vite effacées par d'inoubliables chagrins. Il n'est pas nécessaire de le dire aux enfants".


Le récit parait un peu catapulté, comme trop facilement mis en avant, et le héros incarné par un très bon Jean-Paul Rouve un peu trop naïf peut-être. Un petit garçon lui ressemble, et, sur un coup de tête, il cherche à le retrouver et même à intégrer sa famille qui s'avère être une copie parfaite de la sienne, alors qu'il était petit. Mais finalement, qui n'a jamais agit d'une manière apparemment irraisonné, sur le coup d'une intuition? Je noterai aussi la prestation impeccable et implacable de Benoît Poolevorde, vrai, sincère et juste, je me suis réconciliée avec cet acteur!


Un film sobre, pudique, intime, qui met en avant les sentiments des uns et des autres, à tout âge, mais surtout l'importance des liens familiaux et des moments partagés, souvenirs éternels lorsque tout s'arrête.

KévinDylan_Jord
7

Créée

le 5 janv. 2017

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