Un film à la réputation si façonnée par l'indifférence presque totale et les rires affectueux de ceux qui savent trouver le bonheur dans un nanar douteux que je me suis plongé dans une petite réflexion méditative lors de ses longueurs inutiles : Dois-je me culpabiliser d'avoir vu bien pire que ça ou me féliciter de trouver ici une friandise absolument charmante ?
Ersatz pâlot de "One million years B.C." dont il reprend les plus fabuleux ingrédients, orchestrant DES GROS DINOSAURES en stop-motion et des clones de Rachel Welch à peine vêtues de peaux de bêtes grossièrement déchirées, ce "When Dinosaurs Ruled the Earth" a aussi un scénario, mais on ne lui fera pas l'insulte de l'expliciter ici, support friable et dispensable pour la mise en scène du reste qui, chose incroyable, ne se contente pas du simple calque sans saveur mais se permet aussi une belle générosité parfois bouillonnante à base de grands sauriens qui grognent.
Alors on délaisse très vite les conflits tribaux de rigueur lors desquels les femelles savamment boursoufflées aux endroits les plus subtilement provocateurs agitent leurs corps lissés au Tahiti Douche dans des pugilats hystériques et où les mâles broussailleux règnent d'une patte sage et ferme pour s'attarder plus avant sur le reste, autrement plus aguicheur, comme :
UN GROS PLESIOSAURE qui pourrait être décrit comme un mélange indécis entre un diplodocus et une otarie obèse, mouvant ses formes distordues avec grâce, allègrement découpées sur un fond de flammes dansantes.
UN GROS CHASMOSAURUS qui rend immédiatement reconnaissant envers le film tout entier d'avoir osé opter pour la collerette triangulaire de ce cératopsien plutôt que pour le sempiternel faciès tricorne de son proche cousin le tricératops ou celle de l'hérissé styracosaurus. Ca change un peu et c'est fort agréable.
UNE SCENE DE RAPT PAR UN PTERODACTYLE BORDEL, trop rare au ciné bien que mythique depuis 1933, le lézard volant qui vient cueillir un humain est toujours gage de grand moment !
LE RHEDOSAURUS QUI S'INVITE ! Le bestiau de The Beast From 20,000 Fathoms, rejeton splendide et gaillard de Ray Harryhausen, mi-iguane mi-baleine à bosse, ici en guest star. Heureux de ce nouvel emploi et surement désireux de varier sa palette de rôles, l'animal adopte l'héroïne, celle ci apprenant l'art de communiquer avec les gros reptiles ventrus par le moyen astucieux d'une flûte étudiée, présageant les plus épiques moments de Jurassic Park 3. L'émotion est à son comble au Mésozoïque approximatif (plus ou moins 64 millions d'années).
DES SLURPASAURS ! Les slurpasaurs sont ces reptiles déguisés qui firent les plus beaux dimétrodons cinématographiques, apanage du Voyage au Centre de la Terre de 1959. Un iguane, quelques bouts de caoutchouc assemblés en vrac et des gros rugissements et on a un cosplay de stégosaure des plus convaincants !
Bien entendu on ne s'attache pas au fond ici, pour autant qu'il y en ait un, mais à la forme qui, à défaut d'être très subtile, propose un enthousiasme tout à la fois prodigue et plutôt bien foutu, évoquant toute l'imagerie de vieux bouquins habituelle, et élaborant quelques scènes sauriennes du plus bel effet. Un imaginaire séduisant disposé sur une ossature de nanar, voilà qui s'avère pour le coup amplement suffisant.