Sur le mode anglo-saxon, une maison de retraite pour musiciens prépare un gala dont les bénéfices permettront, peut-être, de boucher son déficit annuel. Il me plait d'imaginer que si Dustin Hoffman a choisi ce thème pour le premier film qu'il dirige, c'est dans le dessein d'abonder discrètement le budget de quelques maisons de retraite pour artistes dont les derniers galas auraient un peu foiré.
Quel que soit le nombre d'étoiles que ce film très soigné puisse intrinsèquement mériter, je lui en rajoute une pour ses images, belles et paisibles comme la fin de vie que je souhaite à tous ceux qui lisent ce bout de critique. Et encore une autre pour avoir eu l'idée, profondément humaniste et solidaire, de choisir ses comédiens parmi d'authentiques musiciens retraités. Et une étoile de plus pour le casting lyrique. Les spectateurs qui auront le bon goût de lire la fin du générique pourront constater qu'une large partie des plages musicales du film ont été jouées et chantées un quart ou un demi-siècle plus tôt par les acteurs eux-mêmes.
Je recommande de rester à sa place durant ce générique, car il fait partie de l'oeuvre: à côté du portrait actuel des personnages du film, il montre le visage que ces acteurs-musiciens avaient dans leur fraîche gloire, il y a 30 ou 50 ans. Ainsi va la vraie vie, si intimement émouvante quand baisse l'éclairage de la rampe.
Autre raison de rester après la dernière image: la joie de réentendre (ou de découvrir) l'enregistrement historique du sublime "quartet" de 1971 reconstitué par le scénario (d'où le titre du film). Lorsqu'on l'a entendue une seule fois, cette interprétation du quatuor de l'acte 3 du Rigoletto de Verdi devient inoubliable et les affront du temps n'y pourront définitivement rien. Tel est d'ailleurs l'argument sur lequel repose tout le film: en 4 minutes immortelles, la Québécquoise Huguette Tourangeau (qui vient de fêter ses 75 ans), l'Américain Sherril Milnes (qui réchauffe ses 78 ans au soleil de la Floride), l'Italien Luciano Pavarotti (décédé en 2007 à 72 ans) et l'Australienne Joan Sutherland (récemment décédée en Suisse à 84 ans) ont créé un égrégore magique qui mérite de balayer les soucis budgétaires de tous les artistes retraités des divers continents.
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le 8 sept. 2013

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