Tavernier ! Ca fait deux heures qu'on demande à boire !!!

Un film sur la régence de Philippe d'Orléans, pour qui connait un peu son histoire de France, ça peut promettre de bien jolies choses...


Et donc, oui, ça se regarde sans trop d'ennui, parce que le sujet m'intéresse et que je suis de bonne composition ce matin. Je m'offre un petit déjeuner campagnard, avec de charmantes terrines de l'Aveyron pour accompagner le café et puis, comme ça dure bien deux heures, je peux enchaîner presque tout de suite avec de la cochonnaille et un petit Brouilly, le contexte ayant l'air de s'y prêter.


Le film essaie sans réellement convaincre de montrer une vie à l'époque moderne plus réaliste que dans l'imaginaire collectif. Du coup, Tavernier accumule les détails les plus triviaux avec une forme de complaisance coupable qui en vient à offrir l'effet inverse que celui escompté. Moi-même, friand comme toujours des petits détails de vie quotidienne, je me suis senti volé dans mon vice; tout est tellement appuyé que le film vire à la démonstration un peu grossière. Ceci n'est d'ailleurs pas aidé par une reconstitution à peine correcte, des mouvements de caméra approximatifs, des acteurs inégaux récitant de pseudo-bons mots qui font mouche une fois sur dix (je préférais le Aurenche d'avant, moi, ou alors faut croire que Pierre Bost avait du talent pour deux...) et un parallèle raté sur l'époque Giscardienne...


Mais bordel ! C'est un comble quand même d'avoir autant de possibilités pour faire un film qui sente la volaille rôtie, le mauvais vin des tavernes et le foutre séché et de faire quelque chose d'aussi inodore à l'arrivée !


Sinon, c'est toujours amusant de voir un faux complot de dégénérés Bretons voulant instaurer une république chez eux, les intrigues de la cour, les alliances secrètes, les débauches qui ne le sont pas et les compromissions les plus diverses. Je suis persuadé que ça pourrait satisfaire les spectateurs qui n'en auront rien à foutre de voir la cour à Versailles en 1719 plutôt qu'au Palais Royal, et autres fantaisies historiques délirantes... A noter tout de même que l'idée d'utiliser une musique composée par Philippe d'Orléans lui-même est assez réjouissante.


Pour ceux que l'histoire en question intéresserait, par contre, je leur conseille plutôt de lire La fille du régent, d'Alexandre Dumas, qui a au moins le mérite d'avoir réellement cet aspect jubilatoire que Tavernier essaie vainement de façon si pathétique d'insuffler à toutes forces dans son film...

Torpenn

Écrit par

Critique lue 3.2K fois

32
4

D'autres avis sur Que la fête commence...

Que la fête commence...
Docteur_Jivago
7

Don Quichotte de Bretagne

Louis XV trop jeune, c'est le duc d'Orléans qui assure la régence, non sans mal, avec un complot qui se trame en Bretagne, avec l'idée que Philippe V d'Espagne, petit-fils de Louis XIV, puisse lui...

le 23 sept. 2022

21 j'aime

6

Que la fête commence...
Sergent_Pepper
7

Soupers de chairs

Après avoir torsadé le polar dans L’Horloger de Saint Paul, Tavernier s’attaque au film historique, un genre dans lequel il s’illustrera à de nombreuses reprises. Le goût pour la reconstitution...

le 13 avr. 2021

18 j'aime

Que la fête commence...
Moizi
7

La foire aux détails

Ce qu'il y a de fabuleux avec ce film c'est que Tavernier s'attaque à une période peu connue de l'Histoire de France, entre le décès de Louis XIV et le règle effectif de Louis XV : la régence assurée...

le 24 sept. 2018

16 j'aime

Du même critique

Into the Wild
Torpenn
5

Itinéraire d'un enfant gâté

A 22 ans, notre héros, qui a feuilleté deux lignes de Thoreau et trois pages de Jack London, abandonne sans un mot sa famille après son diplôme et va vivre deux années d'errance avant de crever comme...

le 17 nov. 2012

468 j'aime

181

Django Unchained
Torpenn
4

Esclavage de cerveau

Aussi improbable que cela puisse apparaître à mes lecteurs les plus obtus, j’aime bien Tarantino, je trouve qu’il arrive très bien à mettre en scène ses histoires, qu’il épice agréablement ces...

le 22 janv. 2013

393 j'aime

174

Le Parrain
Torpenn
10

Le festival de Caan...

Tout a déjà été dit sur ce film, un des plus grands jamais réalisé. Tout le monde a vanté, un jour son casting impeccable : un Brando ressuscité, un Pacino naissant, bien loin de ses tics...

le 6 janv. 2011

365 j'aime

131