Écrire aujourd'hui sur Ready Player One c'est un peu comme tirer un coup à blanc dans l'épaisse volupté de ce divertissement qu'est le cinéma. C'est à dire que tout le monde s'est déjà rué sur les claviers, évoquant probablement l'essentiel de ce que l'on peut dire sur le sujet.


Quid, le mot me titille.


Ce qui est plutôt cocasse c'est qu'en tout premier lieu je n'avais pas spécialement envie de le mater celui-là. On avait les bandes-annonces épileptiques et ce tintamarre médiatique matraquant comme ta dernière gueule de bois.


Bof.


Me retrouver dans une salle sombre au milieu de clampins venus se gargariser d'intelligence et de finesse à baver devant une chiée de références pop-culture.


Très peu pour moi.


Et puis les premiers avis sont tombés, chutant par amour sur les pavés de ce site, parlant immédiatement d'un incontournable de 2018.


Pourquoi pas finalement.


Eh bah oui, oui et re oui.


M'attendant, encore un peu groggy par l'attente fébrile, à un sale mélange entre une bombe visuelle et une finesse sur l'univers "geek" (terme pot-pourri, hélas) digne de l'exécrable Cartouche de Cyprien, je peux vous dire que j'ai rapidement envoyé chier mes salamalecs de vieux con avant l'heure.


Est arrivé un moment dans l'œuvre de fiction où vouloir à tout prix "être cool" grâce à pléthore de références peut fonctionner sans que t'ai à sentir les gros doigts de Spielberg dans le fondement. Quel soulagement, bordel... Est également arrivé un moment où l'on peut s'en battre complètement, prenant les choses comme elles viennent.


Chiasse.


Pourquoi dont ? Quel miracle est-ce ? Où est la fourberie, le piège me dira-t-on ?


De prime abord, on peut dire que la course effrénée à la référence n'intervient presque qu'en sous-couche dans le bousin, le regard étant captivé non sans captivité par un flot numérique très recherché comme sublime. Et puis, quelque part, il est intéressant de s'imaginer ce futur proche bien plus sclérosé par la pop-culture de notre époque que nous ne le sommes par celle des années 80. Balancez le reste dans la réalité virtuelle et vous obtenez une cohérence toute trouvée. Et puis merde, ce serait enculer les mouches sur la moustiquaire que de n'y voir là qu'un immense produit poussif juste bon à caresser dans le sens du poil une poignée de fanboys décérébrés. Vu ce que t'offre le film en retour, on ne peut pas dire que t'es allé gâcher ta soirée, ça non.


L'instant est fort, du moins suffisamment pour te le faire remarquer lorsque tellement d'oeuvres ne présentent qu'une émotion moyenne, de circonstance, parvenant à peine à te la faire frémir sous une douche froide. Et, loin de moi l'idée d'aller crier au génie lorsque l'ensemble ne s'avère parfois que trop imparfait, branlant dans les bambous les racines d'un scénario attendu, basique, mais soyez m'en témoin, on se rattrape au pinceau sans besoin d'une échelle.


Si l'on en ressort avec la très nette impression de s'être fait passer au rouleau compresseur, explosant au passage la rétine, on retient néanmoins myriade d'éléments d'une qualité toute réelle, poignante :



  • C'est beau. C'est même putain d'impressionnant d'arriver à créer pareil univers aux visuels puissants de nos jours lorsqu'on a la fâcheuse tendance à penser avoir tout vu en la matière.

  • C'est dynamique. Bon dieu, la première scène de course est simplement un exemple parfait du rythme clé, celui-là même qui parvient sans mal à faire oublier qu'on se trouve dans une salle et non dans l'écran.

  • C'est classique et la fin n'étonnera personne, seulement l'écriture fait que tout est bien ficelé. À croire qu'on aurait dû mal à vouloir que pareille histoire se déroule autrement.

  • Et puis, Ready Player One, fourmille d'idées assez incroyables, le niveau Shining en figure de proue. Sérieusement, quoi qu'on puisse évoquer sur le film, ce passage résonne en nous comme autant de prouesses perçues.


Voilà. J'ai vu, vaincu ma profonde réticence pour recommencer à espérer. Spielberg est parvenu à renouer avec la grandeur, à défaut d'une complexité que de toute manière nous ne cherchions pas ici. Un exemple, à bien des niveaux.

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le 3 avr. 2018

Critique lue 490 fois

25 j'aime

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Fosca

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