Cela fait plusieurs années maintenant que Steven Spielberg s’est mis en retrait du genre « spielbergien », marque déposée dont se prévaut le tout-Hollywood dès lors qu’il s’agit de raconter une histoire hors du commun à hauteur d’enfants. Un passage de flambeau officieux qui a vu ses épigones autoproclamés déferler sur le cinéma ces dernières années, pour le meilleur (Juan Antonio Bayona) et pour le pire (tous les autres, ou presque). De fait, plus encore qu’un style et un savoir-faire, l’héritage du cinéaste s’est transformé en madeleine de Proust derrière laquelle court l’entièreté des acteurs de l’industrie. Les studios donc, mais aussi les nostalgeeks figés dans une époque révolue, qui ont mis sous cloche les émotions de leur enfance dans l’espoir qu’une séance « Ambin approved » n’en soulève le couvercle. Principal dépositaire des souvenirs celluloïdés qui ont façonné l’imaginaire de toute une génération, Spielberg s’est réincarné à son corps défendant en licorne pourchassée dans l’espoir de respirer à nouveau le liquide amniotique d’un âge d’or fantasmé.
Bien conscient que le concept qu’il véhicule n’a plus grand-chose à voir avec le cinéma tel qu’il se fait un point d’honneur à le pratiquer, Spielberg n’a jamais essayer de se mettre à niveau du fantasme qu’il projette (et quand il essaie malgré tout, ça se passe moyen, cf : "Indiana Jones et Le Royaume du Crâne de Cristal"). Y compris dans des films comme "Les Aventures de Tintin" ou "Le Bon Gros Géant", tous deux dirigés vers un public plus jeune mais qui se gardaient bien de revenir sur les chemins qu’il avait déjà exploré. De fait, on ne doutait pas un seul instant que le réalisateur n’abordait pas "Ready Player One" comme un moyen de servir la soupe réclamée par les spectateurs avides de nostalgie lyophilisée. Mais il était évident qu’en adaptant un roman connu comme une célébration pantagruélique de la culture pop, il comptait d’une façon ou d’une autre reprendre la main sur cette créature qui lui échappé.
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