Ce fut une surprise. C'est sans grande envie que je suis allé découvrir "Réalité" de Quentin Dupieux, "Wrong"un précédent long métrage m'ayant laissé de marbre. Et c'est emballé que je suis ressorti. Dès la première image j'étais dans le film. Un plan avec une lumière beige, couleur qui ne quittera pas l'écran et qui adoucit de manière imperceptible les situations mais qui ensoleille aussi les décors, un plan dans la nature, où un homme abat un sanglier, l'emporte chez lui et le dépèce sous l'oeil attentif de sa petite fille, Réalité. C'est grâce à son talent d'observatrice qu'elle apercevra au milieu des viscères de la bête une cassette VHS bleue qu'elle n'aura cesse de récupérer pour la visionner. Puis nous retrouvons dans une salle de projection, Bob Marshall, un producteur,visionnant les rushes d'un film tourné par une sorte de maître du cinéma du réel. Sur l'écran apparaissent les images de la scène du sanglier....mais il sera dérangé par Jason, une vague connaissance, qui souhaite réaliser un film autour d'une histoire improbable de téléviseurs ayant colonisés les cerveaux des humains jusqu'à les faire exploser ! Marshall accepte de produire le film si les gémissements entendus lors de la mort des humains sont dignes d'être oscarisés....
Raconté comme cela, on est bien chez Dupieux, son absurdité assumée, sa violence gore toujours au bout de la caméra. Si je rajoute un présentateur télé, portant un costume de rongeur, victime d'un eczéma imaginaire et un directeur d'école qui circule en jeep habillé en femme, vous aurez un tableau complet des personnages mais par contre aucune idée de la façon totalement inventive dont le réalisateur va mixer tout cela pour rendre son film assez surréaliste. Parce que tout cela va s'imbriquer jusqu'à l'absurde, une joyeuse mise en abîme de plus en plus folle emporte le film dans des contrées dans lesquelles le cinéma s'aventure peu. On laisse tomber toute logique et l'on s'embringue dans un monde parallèle et irréel. Si ça fonctionne si bien, c'est que Quentin Dupieux pense à créer des personnage savoureux, décalés, hyperactifs ou joyeusement décalés. L'humour est toujours présent comme un clin d'oeil complice. Sans jamais nous lasser, il joue avec la réalité des lieux, des choses, des personnages, explosant la logique jusqu'au délire.
En faisant de son acteur principal Alain Chabat, lunaire et sympathique en diable, un véritable héros positif et fédérateur, il emporte plus facilement le spectateur dans ce jeu fascinant. Cela parfois rappelle un Lynch ou le Bunuel des années 70, mais avec la drôlerie en prime par rapport au premier et la vigueur d'une jeunesse qui ose tout qui était un peu absente dans les derniers films du maître espagnol.
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pilyen
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le 18 févr. 2015

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