Mini rétrospective Hitchcock et donc mini chroniques !
La nouvelle épouse de Maximilien de Winter, frêle et innocente, réussira-t-elle à se substituer à l’ancienne Madame de Winter, morte noyée dans des circonstances mystérieuses ? Un conte de fées cruel et vénéneux, d’après le best-seller de Daphne du Maurier.
En 1940, deux ans après sa sortie en livre donc, Hitchcock reprenait le Rebecca de Daphne du Maurier pour une retranscription des plus fidèles. Ce qui marque dans le film, c'est le mélange des genres et là aussi, la grande modernité de son réalisateur. Dès le début, on aperçoit un superbe manoir (jolie maquette) qui se révèle une ruine pourrissante, presque sortie d'un mauvais rêve.
Et mauvais rêve, celà va le devenir pour la pauvre Joan Fontaine puisque dans un gigantesque flashback (l'intégralité du film en fait ! Il fallait le faire !) nous allons assister à une romance entre cette jeune orpheline secrétaire d'une marâtre stupide et le riche et mystérieux Maxime de Winter (Laurence Olivier) suivi d'une lente dégradation dans une certaine noirceur à la décomposition de cet amour face à une morte troublante, Rebecca, qui se mêle, tel un troublant et puissant maléfice, aux amour du couple.
C'est que Rebecca vampirise littéralement toute l'histoire. Hante chaque coins et recoins de la pellicule, des non-dits du châteaux aux personnages eux-mêmes.
C'est que Rebecca symbolise le passé.
Mais un passé maudit, inquiétant, qui sera lentement dévoilé au fil du film au spectateur/trice, montrant qu'il ne faut pas se fier aux apparences (on pourrait consacrer tout un dossier à Rebecca ainsi qu'à pas mal de films du réalisateur. Ici le maître-mot c'est "apparences" et Rebecca est avant tout un grand drame noir sur les apparences). C'est là, la grande force du film : retourner les conventions et continuer encore à surprendre agréablement plus de 60 ans après sa réalisation.
Ainsi, toujours au bord de craquer, la jeune fille tiendra pourtant bon et le froid et distancié De Winter, à mesure qu'il se confiera à sa jeune épouse, deviendra des plus humains. Paradoxalement, on apprendra que la fameuse Rebecca était loin d'être une sainte nitouche (c'est le cas de le dire : adultère, caractère des plus odieux et méprisants... Vers les 3/4 du film, le "personnage" --on parle d'une morte, mais on pourrait parler de "morte-vivante" puisqu'au délà de la mort elle poursuit encore les personnages principaux) et que la gouvernante Mrs Danvers est une remarquable sorcière (mais pas au sens le plus positif non. De par son jeu froid Danvers est déjà dès le début du film confiné dans une certaine zone de folie qui n'ira qu'en s'agrandissant...).
Ajoutons à cela une sorte de romantisme parfois un peu guimauve et l'on comprend facilement qu'Hitchcock tourne à sa manière un conte fantastique : Une jeune orpheline, un "château", un prince, une sorcière, une "zombie" ou fantôme... Mais on est chez Hitchcock, pas dans un illustré pour jeunes enfants et l'ensemble vire parfois plus au film limite glauque qu'a un gentil Walt Disney d'après guerre.
J'ai évoqué le flashback comme postulat principal du film mais l'ouverture en elle-même est des plus frappante. Une grille fermée, un manoir au loin et la caméra qui rentre dans la grille pour aller à ce manoir... Celà ne vous évoque rien ? La même année sort un chef d'oeuvre qui débute presque de la même manière : Citizen Kane.
Coïncidence étrange, non ?
Tout ça pour arriver encore au fait que ce diable d'Hitchcock était décidément un grand maître du cinéma.