Qui a peur du grand méchant Russe ? Sachez que vous devriez, car le Russe est froid, le Russe est fourbe, le Russe est un monstre mi-homme mi-bureaucrate qui n'hésite pas à torturer ses semblables pour les transformer en super-espions. Heureusement, l'Amérique a bu un grand bol de liberté et veille au grain.


C'est en tout cas la morale de fin de Red Sparrow, qui est un de ces films qui vous fait dire que la Guerre Froide n'est pas tout à fait finie. L'histoire de Dominika (Jennifer Lawrence), ballerine russe forcée par Moscou à devenir une espionne froide comme la Sibérie, qui séduit les hommes pour faire tomber un agent américain.


Avec un tel pitch, Red Sparrow - ou le Moineau Rouge, dans la langue de Garou - avait tout pour être une excellente parodie de ces séries B bas du front dézingant l'URSS, tracts filmiques emblématiques des années Reagan. Mais non. Premier degré à en crever d'ennui, le métrage creuse toujours plus profond dans les abîmes du ridicule. Uniformes de l'URSS jamais remisés au placard, dans une Russie pourtant actuelle : check. Accents russes forcés de méchants de James Bond : check. Allusion permanente au "président russe", en mode "je ne dis jamais son nom mais suivez bien mon regard" : check.


Et le pire, c'est que le réalisateur Francis Lawrence, multirécidiviste car déjà auteur de trois Hunger Games sur quatre (quand même), embarque du beau monde dans sa triste farce : on y retrouve Charlotte Rampling et Jeremy Irons, dont la présence au casting restera un mystère. Mais après tout, on a tous besoin d'arrondir nos fins de mois.


Et pourtant, Red Sparrow est sans aucun doute un film important. Si, si. Important, car il est le témoin d'un tournant. L'Amérique hollywoodienne en a marre de dérouiller du musulman dans ses films d'action. Plus de quinze ans après le 11 Septembre, elle a besoin de retour aux sources : il est temps de castagner du Ruskoff comme au bon vieux temps du monde bipolaire. Ce qui annonce de bien beaux films dans le futur, si celui-ci venait à marcher.


Alors appelez Alain Chabat, plus de vingt ans après La Cité de la Peur, il est peut-être temps de le tourner, ce "Red is Dead".

Cyprien_Caddeo
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le 5 avr. 2018

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Cyprien Caddeo

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