RELEVE : Histoire d’une création (15,6) (Thierry Demaizière/Alban Teurlai, FRA, 2016, 120min)
Ce formidable documentaire immersif suit le parcours de Benjamin Millepied, danseur chorégraphe français nommé directeur de la danse de l’Opéra National de Paris en novembre 2014, lors de son processus créatif pour son premier ballet, ainsi que dans ces fonctions annexes. Thierry Demaizière, célèbre journaliste interviewer du dimanche soir dans l’émission « Sept à Huit » aidé par Alban Teurlai pour l’image s’attache à dresser le portrait de ce jeune chorégraphe au regard moderne dans son désir de renouveau dans cette prestigieuse institution ainsi que dans la préparation au jour le jour de son premier spectacle en tant directeur. La mise en scène extrêmement soignée s’attache à suivre cela du premier jour des répétitions jusqu’à la générale en fictionnant l’histoire avec un décompte des jours plein écran comme un film à suspense. La caméra immersive ne lâche pas Benjamin Millepied qui joue sa crédibilité devant nos yeux, se laissant filmer assez intimement sans filtre notamment dans ses moments de découverte de la musique du ballet, ses moments de doutes, ses moments où il fait face à la bureaucratie, menace de grève, contingences administrative, manuelles avec parfois du matériel obsolète et les cours de danse à donner. On découvre que sa première décision par exemple est d’avoir fait changer tous les parquets des salles de répétition pour un meilleur confort pour les danseurs, et d’avoir demandé la création d’une plate-forme digitale qui n’existait pas. Les réalisateurs nous font découvrir cette homme débordant d’énergie, toujours concentré sur un même objectif : l’exigence de réussir un ballet classique qui casse un peu les codes esthétiques en apporte une fraîcheur nouvelle. Le long métrage loin du people et du voyeurisme, nous dévoile sa secrétaire Virginia complètement dévouée et qui se démène la plupart du temps pour savoir où se trouve Benjamin et reste toujours à bonne distance. Cet élégant documentaire techniquement impeccable alterne de façon didactique les scènes pour bien comprendre tout le cheminement créatif, montrant l’importance que la musique occupe dans l’esprit de Millepied ainsi que sa bienveillance envers ses danseurs qu’il incite avec douceur, la banane et le sourie de laisser libre cours à leur ressenti et de se confier plus facilement sans avoir de crainte. La caméra s’approche au plus près des corps, prend le parti pris (un peu dommage) de s’intéresser essentiellement au haut du corps et d’avoir des cadres assez similaires tout au long du film, bien entendu nous observons quand même le travail de pointe et la chorégraphie se mettre en place petit à petit (pas) dans son ensemble. Cette œuvre démontre aussi le besoin du chorégraphe de fédérer autour de lui de jeunes artistes de son temps comme la styliste Iris van Herpen créatrice de costumes un peu mutants, le musicien contemporain et lyrique Nico Muhly à l’inspiration électronique, le collectif UVA créateur d’une lumière interagissant sur les corps des danseurs et le chef d’orchestre « fou furieux » de 25 ans Maxime Pascal. Le travail de l’image sur les corps offre des moments de grâce absolus que ce soit dans l’humidité d’une salle de répétition où sur la grande scène où le ballet prend forme et devient visuellement à couper le souffle. Un réel plaisir sensoriel tout au long de ce magnifique documentaire qui offre une nouvelle approche et la sensation particulière d’être immergé dans un vrai récit, ainsi qu’une démonstration de la sclérose, la rigidité de ce « paquebot institutionnel » bien difficile à manœuvrer, dépoussiérer et à révolutionner. Les réalisateurs expédient rapidement l’échec de cette révolution par Millepied en notifiant juste par quelques lignes incrustées sur l’écran sa démission le 04 février 2016 laissant sa place à Aurélie Dupont (danseuse étoile et maître de ballet). Venez-vous plonger sans sophistication dans cet univers souvent fermé et voir cet artiste prendre la « Relève : histoire d’une création ». Passionnant, esthétique, épatant et touchant.

seb2046
8
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le 21 sept. 2016

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