Bon je viens de sortir de l'avant première, du coup mon impression du film se fait à chaud.
Premièrement je suis plutôt agréablement surprise (je m'attendais vraiment à m'emmerder et à souffler à chaque plan); si l'histoire n'est pas originale (voir téléphonée par moment) on n'en passe pas néanmoins un moment désagréable. Le jeu d'acteur est bon, spontané, sincère évitant de tomber dans le tragique trop facilement. Le problème c'est que le film de Mélanie Laurent, pourtant inspiré par un bouquin, n'a eu de cesse de m'évoquer un mélange entre "Naissance des pieuvres" de Sciamma et "Cracks" de Jordan Scott. Aucune originalité donc de mon point de vue; les personnages sont ceux de Sciamma avec quelques années de plus (d'ailleurs la ressemblance physique est frappante), et la passion qu'anime Charlie pour Sarah est celle d'Eva Green pour Fiama dans "Cracks". Du coup, aucun rebondissement (pour ma part), la fin est prévisible - saluons quand même la dernière scène où enfin la mise en scène sert l'histoire. Parce que oui le gros problème de Mélanie Laurent c'est son manque d'innovation dans la réalisation; on a le droit à une succession de champ contrechamp, de plans cadrés sans intention derrière (ou alors il va falloir m'expliquer), des plans et séquences clichés, vus mille et mille fois..Il y a peut être deux ou trois plans qui ont attiré mon attention, pas plus et c'est dommage. D'autant plus qu'elle citait en interview l'influence de "Martha Marcy May Marlene" de Durkin, si influence il y a eu c'est uniquement en terme narratif (paranoïa, folie) et à petite échelle, visuellement on est loin de la réalisation de "MMMM" où l'oppression du personnage n'avait besoin que des images pour être signifiée (dans "Respire" je trouve que le cadrage n'évoque en rien cela, ce sont les actions qui ont seules cette charge).
L'autre problème du film est qu'il n'y aucune ambiguité quant à la nature des personnages; c'est trop manichéen et la scène de fin vient nous en rendre complice en mode "ouais t'as vu j'ai fait ce que tu désires depuis 45minutes". Le personnage de Sarah n'est pas réellement développé en terme d'humanité, seulement une phrase de Charlie y fera référence (+une scène "familiale") : "t'es pas méchante, t'es juste paumée". En fait Sarah est juste filmée comme une image, une objet de désir et de sensualité, dont la manipulation semble alors enlever toute humanité en elle - alors que merde il y avait moyen de la rendre beaucoup plus ambigue, ce qui aurait accentuer notre identification au personnage (ou tout du moins de l'empathie) ainsi que notre attention face à la tension dramatique. En fait, le scénario M.L l'a écrit en pensant à sa propre histoire, du coup ce manque de recul sur l'événement gâche le relief de chaque personnage, les inscrivant dans un rôle précis de bon ou de méchant sans aucune ambivalence.

Bon après tout ce n'est que son deuxième film, qui plus est, fait avec passion, humilité et de bonnes attentions ( c'est du moins ce que l'on ressent lorsqu'elle en parle). Alors oui il y a des défauts, des maladresses et des facilités, mais pour être honnête le film se regarde agréablement. Avec son rythme tout en latence pour relater une passion animée, le film gagne en fascination et évite de tomber dans la tendance mélodramatique, et ça je l'en remercie.
sarahcapilliez
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le 7 oct. 2014

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Sarah K

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