Gus Van Sant, grand pessimiste de par sa filmographie, nous surprend avec son nouveau film Restless, qui porte un regard léger et poétique sur la mort.
Depuis le décès de ses parents dans un accident de voiture, le jeune Enoch passe ses journées aux enterrements d’illustres inconnus ou à discuter avec son meilleur et unique ami, Hiroshi, un fantôme, ancien pilote kamikaze japonais. Sa vie bascule lorsqu’il rencontre Annabelle, jeune fille en phase terminale d’un cancer, pourtant pleine de vie et passionnée par Darwin et la vie de toute créature. La rencontre va chacun les aider dans leur épreuve et faire naître une relation inespérée.


C’est joli hein ? A vrai dire, en y réfléchissant bien, pas de surprise à l’horizon, tout est dans le résumé. On sait ce qui va se passer. Prévisible ? Probablement trop pour moi puisque le film m’a profondément ennuyé et même agacé. Cela reste un thème rebattu : deux êtres que tout sépare vont se rencontrer, s’aimer, petite contrariété aux ¾ du métrage puis retrouvailles (oui, après elle meurt mais c’est pas grave, il aura appris plein de choses). Vous allez me dire « Et alors ? Ca ne veut pas dire que ça ne peut pas être beau ou émouvant ».
Effectivement, ça ne m’aurait pas dérangé si tout n’était pas amené de manière aussi artificielle. L’exposition d’Enoch est vraiment expédié, il rencontre Annabelle au bout d’environ 2 minutes de métrage et c’est parti, elle le suit partout, soyons amis. La complicité est immédiate, ils improvisent des dialogues avec les parents morts d’Enoch et hop, je pense qu’on peut crier au génie… Ou à l’anti-spontanéité. Car les dialogues, aussi soignés soient-ils, peut-être trop justement, ne sonnent pas justes. Un peu trop lisses, forcés. C’est la raison pour laquelle je n’ai pas pu adhérer au film. Tout est bien trop mièvre, empreint de bons sentiments. Je n’ai pas cru à ces adolescents trop propres sur eux, cette fille, atteinte d’une maladie incurable, forte et enthousiaste en toute circonstance, nous citant du Darwin à tout bout de champ et lui, incapable de faire le deuil de ses parents, sauf grâce à elle, miraculeusement. Et quand il craque, monsieur fait dans la subtilité : il engueule les médecins qui ne peuvent pas sauver tout le monde (sans déconner ?), il en veut à ses parents de l’avoir abandonné alors il met des coups de masse sur leur tombe. Non, vraiment, on ne peut pas parler de finesse.
J’ai, comme beaucoup d’autres personnes, été confronté à la maladie ou à la mort d’êtres chers et voir tout cela théâtralisé et illustré de manière aussi réductrice, est plus révoltant qu’émouvant. Tout cela accompagné d’une musique extrêmement envahissante, en volonté lourdingue d’évoquer la légèreté. Pour couronner le tout, certaines séquences musicales nous les présentent faisant du vélo, ou courant dans l’herbe, tout heureux, ambiance La Petite Maison Dans La Prairie, accentuant ma nausée.
D’un autre côté, nous avons le personnage d’Hiroshi le fantôme. Hiroshi adore jouer à la bataille navale contre Enoch et gagne tout le temps. C’est rigolo, non ? Et puis, ils discutent parce que finalement le fantôme, c’est un peu aussi la conscience d’Enoch, tout ça, vous voyez la métaphore quoi. Et puis, ça donne lieu à des situations burlesques tout ça où Hiroshi apprend Enoch à le saluer, etc… Bref, pour résumer, Hiroshi, il sert à rien.
Quand au film, je serais tenté de dire la même chose : après tout, c’est juste une romance, qui, nous montre, que la mort, c’est pas si grave, que quand on est fort, on est pas triste quand on perd quelqu’un parce qu’on a qu’à penser aux bons moments qu’on a passé ensemble.
Merci Gus Van Sant, j’ai appris beaucoup sur le deuil grâce à toi. Entre deux sarcasmes, je vais quand même plutôt vous conseiller The Fountain, Tree Of Life ou même la série The Big C qui sont des œuvres pertinentes et qui ont des choses à dire, contrairement à ce Restless, rimant étrangement avec Useless.

LudovicMerger
4
Écrit par

Créée

le 16 mars 2017

Critique lue 316 fois

Ludovic Merger

Écrit par

Critique lue 316 fois

D'autres avis sur Restless

Restless
Aurea
6

Au bord de la route

Visage d'ange errant, silhouette juvénile vêtue de noir, Enoch est de tous les enterrements depuis que ses parents l'ont quitté tragiquement. Annabel , adolescente au physique de jeune garçon...

le 1 oct. 2011

31 j'aime

26

Restless
HistoriasExtraordina
5

Critique de Restless par C G

Restless en film d'ouverture de la sélection Un Certain Regard : la décision avait étonné plus d'un cinéphile,à l'égard d'un auteur habitué aux récompenses en Sélection Officielle (Palme d'Or pour...

Par

le 25 juin 2011

25 j'aime

11

Restless
Satané
10

Le meilleur film du réalisateur

"Restless" est bel & bien l'achèvement que j'attendais de Gus Van Sant. Alors que "Elephant" traînait en longueur sans jamais réussir à signifier autre chose que la mort imminente, & que "Paranoid...

le 4 févr. 2012

21 j'aime

12

Du même critique

Halloween Kills
LudovicMerger
1

Halloween Bills

Oui, donc, apparemment, c'est tendance de faire un jeu de mots dans le titre de la critique ici donc en voilà un bien pourri: après 2 épisodes (à partir du faux reboot/vrai suite, démerde-toi), il...

le 16 oct. 2021

3 j'aime

Real Steel
LudovicMerger
7

Robocky...

Des robots qui font de la boxe sur fond de retrouvailles entre un père et son fils, Real Steel, c’est ça. Dans le futur, le monde de la boxe a changé, avec la course au « sensationnel », les...

le 16 mars 2017

2 j'aime

Les Créatures de l'Ouest
LudovicMerger
4

Le cul entre deux genres...

The Burrowers, western avec un concept à la Tremors. Alors, que dire? Et bien, ca commence par cette famille qui se fait attaquer en pleine nuit par on ne sait trop quoi (mais si en fait, c'est des...

le 16 mars 2017

1 j'aime