Rio Corgo
Rio Corgo

Documentaire de Sergio Da Costa et Maya Kosa (2016)

Sur le papier, il s'agit de l'histoire d'un certain Silva, surnommé l'Espagnol par les habitants d'un petit village (son village natal ?) portugais dans lequel il retourne au tout début du film, au terme de ce qui ressemble à un long périple à travers le Portugal. Dans les faits, l'expérience s'avère beaucoup plus compliquée, beaucoup moins certaine. Drôle de moment dès lors que l'on sait qu'on est censé avoir affaire à un documentaire et qu'on se retrouve à en chercher la teneur durant tout le film. La mise en scène de la réalité est évidente, les ellipses sont légion, et les incursions fantastiques propres à la fiction émaillent le récit... Difficile, pour ne pas dire impossible, de cerner précisément les contours de l'objet cinématographique dans ces conditions.


Ce dont on est sûr, c'est qu'on est embarqué dans un petit coin reculé au Nord du Portugal, non loin d'un axe routier majeur, mais dans lequel le temps semble figé. Un tout petit village hors du temps. Silva égraine le nom des villages par lesquels il est passé, ainsi que ses multiples boulots : jardinier, berger, coiffeur, paysan, et même vendeur de parapluie. Au détour des détails, on l'imagine également avoir été clown et magicien, avec une vieille paire de chaussures farfelues prenant la poussière dans une maison abandonnée lui servant de refuge et des tours de magie un peu rouillés. Son sombrero, ses bagues, ses Santiags de cowboy en font un personnage aussi curieux qu'attachant.


Tout au long du film, il déambule dans les rues du village, claudiquant dans ses jardins, errant dans sa maison. Sa vie passée émerge de temps en temps, à travers une discussion avec une ado ou simplement dans l'expression d'une certaine fatigue. La lenteur de la progression narrative tranche étonnamment avec l'excentricité du personnage et de ses environs. Des habitants comme des fantômes, un joueur d'accordéon en (long) duo avec un chien aboyant, et un onirisme qui se fait de plus en plus présent à mesure que le film progresse vers sa fin et celle de Silva. On peut difficilement rester insensible à l'étrangeté de l'atmosphère, à l'incertitude omniprésente, à la douceur des cadres qui découpent des morceaux de poésie. L'épure de la démarche, dans sa rétention ostentatoire d'information, pourra par contre en laisser beaucoup sur le bord de la route, partagée jusqu'au bout avec Silva.

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le 12 oct. 2017

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Morrinson

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