Parce qu’il voulait restituer la texture et le mouvement de la chair dans sa vérité, Rodin (Vincent Lindon) était globalement incompris par ses commanditaires autant que par la critique de son époque qui l’accusait de faire de la « basse sculpture ». Jacques Doillon au contraire montre la noblesse de cet artiste sans concession, acharné de travail, perfectionniste à l’extrême. Il le dépeint donc logiquement à l’ouvrage, utilisant habilement la largeur du format 2:39 allié à une généreuse profondeur de champ pour composer des images dans lesquels apparaissent en perspective le sculpteur, la sculpture et son modèle.


Pour mettre en scène les rapports de Rodin avec Camille Claudel (Izïa Higelin), élève qui souhaitait dépasser le maître, Doillon met aussi à profit le format large anamorphosé pour chorégraphier des dialogues amoureux tourbillonnants dans lesquels, les personnages se tournant littéralement autour, il filme non seulement des esprits, mais aussi des corps désirants. Isomorphe dans ses partis-pris de réalisateur avec ceux de l’Auguste sculpteur, Doillon s’attache ainsi à capter la vie, à donner à voir le désir dans sa dynamique, dans son incarnation.
Même si le film s’essouffle un peu à partir du moment où Camille Claudel rompt avec le sculpteur et que la narration perd alors le fil rouge de leurs joutes, il reste un portrait d’artiste riche qui, bien au-delà de la plate illustration, est habité par l’esprit de l’œuvre du Maître.
etsecla
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le 6 août 2019

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