ROGUE ONE : A STAR WARS STORY (16,1) (Gareth Edwards, USA, 2016, 134min) :


Cette fresque épique nous entraîne il y a bien longtemps dans une galaxie lointaine, très lointaine pour narrer cette fois-ci le destin tragique et plein d’espoir d’individus ordinaires devenus repus pour lutter farouchement contre les forces du Mal représentées par l’Empire. Pour le bonheur financier de The Walt Disney Company et en accord avec Lucasfilm et capitaliser un maximum sur la marque Star Wars le projet « Rogue one » en mode spin-off s’avère un pari assez colossal. En effet par rapport à la fanbase, utiliser l’univers du monde étendu et intercaler une histoire dans un texte sacré si le projet n’était pas à la hauteur cela aurait été un sacrilège ! Gareth Edwards auteur du remarqué Monsters en 2010 puis avec la grosse production Godzilla en 2014 se retrouve aux commandes de cette aventure dérivée de Star Wars avec un épisode se situant entre Star Wars, épisode III : La Revanche des Sith et Star Wars, épisode IV : Un nouvel espoir. Disons-le d’entrée le pari dans l’ensemble est plutôt bien réussi ! Après l’inimitable logo de Lucasfilm, et la phrase traditionnelle, la judicieuse idée de ne pas nous soumettre le générique déroulant pour nous rappeler la situation souligne d’emblée que nous ne sommes pas dans un épisode de la saga Star Wars mais bien dans une histoire parallèle venant s’imbriquer dans la grande Histoire. La mise en scène reprend les codes de la série et multiplie les clins d’œil à la mythologie. La mise en place de l’intrigue avec ces nouveaux personnages, un drame, la découverte de nouvelles planètes et autres bases intergalactiques s’avère un peu laborieuse dans son ensemble mais pas des moins intéressantes. Car cela propulse comme rarement le versant politique de l’histoire de Star Wars. Oui Rogue One est un film politique ! Tous les mécréants qui pestaient sur Disney peuvent ravaler leur salive et ranger leurs mots laser, ici pas de place pour la douceur de Disney, le sombre a pris place ! L’intrigue se repose en majeure partie sur Jyn, jeune femme tourmentée, fille d’un père devenu superviseur sous la contrainte des plans de l’Étoile de la mort et sur le paisible et réfléchi Capitaine Cassian Andor, officier de renseignement de l’Alliance. Tous les deux soutenus par l’Alliance Rebelle, seront à la tête de la mission pour dérober les plans de la nouvelle arme de l’Empire, aidé par une bande de mercenaires et des hommes ordinaires prêts à se sacrifier pour la bonne cause et accompagné par l’ancien droïde K-2SO impérial reprogrammé par la résistance et à l’humour cynique délectable. Au fil de la narration pas toujours fluide dans la première partie du film on découvre plus en profondeur les nombreuses fractures de l’Alliance rebelle montrant bien toutes les divisions qui rongent cette Alliance malgré leur intérêt commun ainsi que des décisions nécessairement plus guerrières et donc la nuance du manichéen Bien contre les forces du Mal trouve enfin des particularités moins caricaturales avant la bataille. Avec pragmatisme la caméra filme avec application les nombreuses tractations et bavardages avant de plonger de manière radicale dans le dernier tiers du film. Rogue One devient dès lors un véritable film de guerre transposé dans l’univers de Star Wars. Mettant de côté la psychologie des personnages principaux ainsi que tout ce qui pourrait forcément nous attacher à eux, ce dérivé n’étant destiné qu’à un film l’équipe scénaristique mise essentiellement le récit de ce spin-off bien écrit car condensé sur un seul objectif majeur, l’action. La mise en scène de Gareth Edwards prend une toute autre ampleur tantôt en caméra portée donc en immersion totale au milieu des combats sur terre ou en orchestrant avec l’aide d’un joystick des mouvements de caméra nerveux pour les époustouflants combats aériens. Pendant près de 45 minutes la guerre fait rage et jamais n’avait connu simultanément à cette échelle là le sacrifice des hommes et un tel massacre aussi bien sur la plage que dans les airs. Les effets spéciaux numériques sont totalement ébouriffants et la fluidité de l’ensemble comme une chorégraphie kamikaze les plus belles séquences de combats de toute l’épopée pour nous offrir une véritable guerre des étoiles. Tout au long du film le metteur en scène n’oublie pas de reconstituer brillamment tout le monde crée par Lucas, à base de vaisseaux spatiaux, stromtroopers, robots, bêtes plus étranges les unes que les autres même si certains éléments iconiques manquent bien entendu à l’appel car ne pouvant pas s’inclure à l’histoire. L’apparition judicieuse de certains caméos (avec prouesse numérique étonnante pour certains) apporte des moments de grands frissons pour les fans que nous sommes notamment lors d’un final grandiose venant s’imbriquer avec maestria avec la phrase du générique de l’épisode originel : « Des espions rebelles ont réussi à dérober les plans secrets de l’arme absolue de l’Empire : l’Étoile de la Mort, une station spatiale blindée dotée d’un équipement assez puissant pour annihiler une planète tout entière. ». Cet épisode à part, trouve alors naturellement sa place aussi bien comme un préquel à l’épisode IV, qu’un séquel de l’épisode III Good job dirons-nous, malgré le manque d’épaisseur un peu regrettable des personnages principaux notamment Jyn Erso et Cassian Andor interprétés convenablement par Felicity Jones et Diego Luna mais manquant singulièrement d’émotions. Ce duo est secondé par un équipage sympathique composé de Chirrut (Donnie Yen) samouraï aveugle, le pilote Bodhi (Riz Ahmed), Baze (l’excellent Jiang Wen ainsi que le robot K-2SO et on notera la prestation impeccable bien que trop courte de Mads Mikkelsen dans le rôle du père de Jyn et Ben Mendelsohn en directeur Orson Krennic. Le bémol de ce casting réside par la prestation singulière et cabotine de Forest Whitaker en radical Saw Gerrera. Quant à la partition musicale de Michael Giacchino, amputée quasiment tout le film des thèmes emblématiques qui ont fait la renommée de la série, elle tente de se fondre dans une même tonalité sans jamais atteindre l’ampleur des compositions originales. Cette aventure initiatique kamikaze d’une noirceur surprenante construit comme une véritable tragédie offre une modernité et des résonnances géopolitiques bienvenues à la saga. Venez donc affrontez les forces obscures à bord de ce Rogue One : A Star Wars Story. Un space opéra sale, contemporain, cohérent et spectaculaire.

seb2046
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le 15 déc. 2016

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