Lorsque Lucas a entrepris de remasteriser sa trilogie originale en y ajoutant à la palette graphique un paquet de bestioles et de saloperies en tout genre, les puristes sont tombés à genoux par terre en hurlant "Pourquoiiiiiii ????!!!!" tandis que des éclairs zébraient le ciel derrière eux. J'en faisais partie ; j'ai encore les égratignures aux genoux.
Aujourd'hui un so-called spin off sort pour nous raconter ce qui s'est passé entre l'épisode III et le tout début de l'épisode IV, et même si cela ne justifie plus de hurler à la mort sur fond de ciel apocalyptique, la question mérite d'être reposée : pourquoi ?
Visuellement, l'affaire tient plutôt bien la route. On n'est pas au niveau de la réussite formelle réalisée par J.J. Abrams il y a deux ans avec son très enthousiasmant Réveil de la Force, mais le cran un poil en-dessous n'a rien de déshonorant : l'univers, son bestiaire et ses décors sont respectés, la grande séquence d'action finale offre des combats de vaisseaux tout à fait divertissants par leur aspect spectaculaire et immersif et le trait d'union qui suit pour faire le lien direct avec l'ouverture de l'épisode IV a quelque chose de très émouvant (malgré un gros plan numérique vilain sur la jeune Princesse Léia, d'autant plus étonnant et malvenu que toutes les scènes avec le personnage de Tarkin, qui usent pourtant du même procédé technique, sont presque troublantes de réalisme).
Mais l'histoire peine à susciter un véritable intérêt. La faute a un casting principal assez faible (Felicity Jones et Diego Luna manquent cruellement de charisme et d'intensité), à une relative pauvreté scénaristique qui comble les vides en répétant bêtement des évidences (pour comprendre, imaginez que la séquence d'action finale se résume à deux personnes séparées par une vitre qui passent leur temps à se dire qu'il faut la casser pour faciliter la communication : euh... ouais !) et au faible enjeu qui sous-tend l'ensemble et renvoie au "pourquoi ?" que j'évoquais plus haut : en expliquant comment la Rébellion a dérobé les plans de l'Etoile Noire, le film lève le voile sur un mystère, ou plutôt met en lumière ce qui aurait pu (dû ?) rester un mystère, racontant un chapitre sur lequel la saga avait fait l'ellipse depuis sa naissance et dont le récit n'apporte rien aujourd'hui.
Plus de trente que les fans pouvaient laisser libre court à leur imagination pour se raconter cette histoire eux-mêmes ; ils auront tôt fait d'oublier cette illustration gentille mais décevante par rapport à leurs projections mentales d'enfants rêveurs que l'industrie vient gaver de produits dérivés.