Merveilleux film que nous livre le danois Nicolaj Arcel, à la fois réalisateur et scénariste de ce morceau d'Histoire du Danemark, alors à l'aube des Lumières. Nous suivons, fébriles, la brûlante passion qui unit la reine Caroline Mathilde et le médecin du roi, l'Allemand Johann Friedrich Struensee, sentant que la chute n'est pas loin. La petite reine pleine d'esprit, vite à l'étroit à son arrivée dans le conservateur Royaume du Danemark et désemparée de ne pas avoir trouvé en Christian le mari qu'elle espérait, retrouve de l'entrain en découvrant par hasard chez Struensee des velléités libertaires. Naît alors entre eux une relation complète, portée par leur attrait commun pour les Lettres et les philosophes frappés par la censure de la Cour. Ensemble, les deux amants couvent l'envie de révolutionner leur époque. C'est alors que le docteur se mue en conseiller privilégié du roi, seul capable de transmettre leurs idées au Conseil d'Etat et auprès duquel il exerce une influence notoire.

La maladie du roi Christian, personnage franchement antipathique au premier abord – presque cruel, est filmée avec une très grande sensibilité, notamment lors des scènes entre ce dernier et Struensee. Pris à la gorge, on assiste impuissant au mal être éprouvé par le roi. La scène du dîner en est l'exemple le plus frappant (et le plus intense). Démuni, il ne s'apaise que dans les bras de celui qu'il considère comme son plus cher ami, son socle, lui demandant simplement à ce que « tout soit comme avant ». Étouffée par sa condition, cette étrange figure royale n'aime que « jouer ». D'abord persuadé de ne pas savoir traiter des affaires de son Royaume, c'est grâce aux répliques dictées par Struensee et apprises par cœur qu'il s'émancipe lors des réunions de son Conseil d'Etat. A chaque loi gagnée à leur cause, il ne cherche qu'une seule chose : l'approbation et la fierté dans les yeux son docteur. Les réelles implications de son action lui importent finalement peu. J'ai été frappée par la tendresse qui se dégage de ce duo.

A mesure que l'obscurantisme recule au Danemark, les intrigues de ceux qui veulent voir tomber « l'infâme allemand » se font plus bruyantes. Paradoxalement, c'est en proclamant la liberté de la presse que notre monarque éclairé et son cercle restreint courent à leur perte.

On se délecte du trio Mads Mikkelsen - Alicia Vikander (dont le jeu m'avait déjà ravie pour le rôle de Kitty dans le « Anna Karénine » de Joe Wright) - Mikkel Boe Folsgaard, parfaitement dirigés. Par ailleurs, la mise en scène et la photo n'ont rien de spectaculaire, on est là dans du classique, efficace et joli.

Voilà donc un film historique beau et instructif, délicat mais ne ménageant pas nos nerfs. À voir si l'on est curieux du Passé et non réfractaire aux « grandes » fresques amoureuses. On en ressort tourmenté et avide de se replonger dans du Voltaire.

NB: Encore une fois, impressionnée par Mikkelsen, intense. Décidément, c'est un acteur que je vais suivre de très près.
Chloecha
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le 31 mai 2013

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Chloé Cha.

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