Pneu mobile, en avant les histoires.

Je ne sais pas vraiment quoi dire, et je ne sais pas non plus trop quoi en penser.
Je ne sais même pas si j'ai vraiment compris l'intérêt du film (s'il n'y aucune raison de faire ce film, pourquoi l'avoir quand même fait? En partant de ce principe, j'estime d'ores et déjà qu'il y a une raison à son existence).
Je sais que j'ai interprété de nombreuses choses, et que j'ai compris beaucoup d'autres choses de ces interprétations, mais je n'ai pas compris si c'est bien cela que je devais comprendre. Et je n'ai simplement pas compris si je devais effectivement en tirer quelque chose où si mon cerveau à travaillé pour rien?

Je n'arrive même pas à déterminer mon appréciation du film. On ne peut pas dire que j'étais transcendé après l'avoir vu, mais je n'étais pas non plus vraiment déçu. À dire vrai, j'attendais avec impatience de le voir, et ce dont je suis sûr, c'est que bizarrement je ne m'attendais pas du tout à ça (oui j'ai vu la bande-annonce, me prenez pas pour une bille non plus).
C'est un film à voir, indéniablement, pour l'originalité de son "scénario" (si tant est qu'il en ait un), pour l'approche peu commune présentée dans l'oeuvre (le "aucune raison") et tout simplement car, même si l'on ne sait pas sur quel pied danser face à ce film, on ne peut pas dire qu'il soit foncièrement mauvais, juste différent et inattendu. Bref c'est un pari osé et couillu comme cela a déjà été dit maintes fois.

[Spoiler]
Le film peut être divisé en 2 points de vue. La vie côté Pneu, et le reste. On doit sûrement pouvoir épiloguer dessus bien plus que cela, mais basiquement et sans trop réfléchir, nous obtenons cette simple opposition de point de vue.

Donc, vue du Pneu, le film est en fait l'incarnation d'une vie.
Le film commence lorsque le pneu prend vie. Il semble délaissé et inerte, mais il prend vie tel un enfant qui vient de naître. Dans un paysage désert qui représente sa vie, vide, n'ayant aucun sens. On le voit donc commencer à rouler, au lieu de marcher, on le voit tomber, pour dire qu'il apprend à rouler. Encore une fois comme un nouveau-né qui ne sait rien faire. Il affronte donc la vie, part à sa découverte et trouvera sur le chemin différents objets (une bouteille d'eau vide en plastique, un scorpion puis une bouteille de bière en verre) qui représenteront en somme ses obstacles. Il ne sait pas ce que c'est et en s'approchant pour les toucher il voit que les objets n'ont pas de vie, il va donc les écraser. À la fois ces objets peuvent hypothétiquement représenter une dénonciation quelconque contre les déchets qui ne sont pas triés ou plus simplement qui ne sont pas jetés, mais dans le film leur présence exprime un entraînement et la découverte de ses propres capacités. Comme lors de l'adolescence, on découvre les domaines dans lesquels on est fort, on découvre de quoi on est capable. Vient après l'expérimentation, si je puis dire, de ses propres capacités. Intervenant ici avec l'explosion de la bouteille en verre.
À ce moment, la première partie du film se termine (toujours du point de vue du pneu) et même s'il découvre encore sa "vie" il est au stade "adulte". C'est pour ça qu'il prendra en chasse une belle demoiselle, métaphore simpliste sur ce que l'homme convoite le plus de façon primitive. Là dessus, le message est à la fois clair et très vague. Clair car il ne faut pas beaucoup de neurones pour comprendre la métaphore, mais si elle n'a aucune raison d'exister dans le scénario, cette scène est clairement affichée puisque étant la seule femme (et belle qui plus est) sur laquelle on s'attarde, mais aussi vague car si l'on reste dans une certaine logique il y a sûrement d'autres points à travailler, bien qu'il n'y ait là non plus aucune raison que la logique soit respectée. Qu'il prendra en chasse pour des raisons inconnues (si tant est qu'il y en ait) jusqu'à la fin du film (peut-être pour symboliser l'inaccessible, mais là je pense que je dérive). Puis tout au long de la seconde partie du film nous entrerons dans une phase de vengeance découlant de l'accrochage que le pneu a subit avec le chauffard qui l'a bousculé. Et bien que l'on pourrait croire (voire même affirmer) que le pneu est basiquement un meurtrier (là aussi nous pourrions interpréter qu'il symbolise le tourment habituel des meurtriers actuels en proposant une raison ou une possibilité qui resterait à démontrer ou réfuter), cette hypothèse tombe à l'eau avec la rencontre entre le pneu et le gosse puisque ce dernier ne se fait pas assassiner. Pour quelle raison? Aucune? Vraiment? Jusqu'à la scène finale, mais j'y reviendrai. Ainsi, ce point de vue symboliserait le déroulement d'une vie comme une autre, en montrant différents évènements grossiers de cette vie qui pourraient déterminer la raison des agissements du personnage qui la vit.

L'autre point de vue est en fait celui des personnages, je ne dis pas spectateurs qui engendrerait une confusion entre nous et ceux du film même si le rapprochement est certain, et je ne dis pas non plus acteurs qui nous écarterait du lot et qui mélangerait maladroitement les acteurs qui jouent des acteurs et les acteurs qui jouent des spectateurs. Donc je dis personnage car dans ce film malgré tout, nous en sommes aussi, nous en faisons partis même si ce n'est pas aussi flagrant que ça puisse paraître. Bref, le point de vue des personnages donne ici toute la signification à l'intro du film où l'officier explique l'existence du "Aucune raison".
L'usurpation, la manigance, la machination, entre guillemets le sadisme à l'état pure de faire regarder un film qui n'a aucun sens à des gens pour les empoisonner, pour aucune raison.
L'abrutisme, l'idiotie, l'absence de bon sens de faire le mouton et de regarder un film d'une séance qui dure plusieurs jours et d'écouter bêtement des inconnus qui te demandent ça pour aucune raison.
De s'acharner sur une pauvre dinde sans demander d'où elle vient et pourquoi elle est servit comme, même pas cuisinée, sans couvert, pour aucune raison. Et d'ailleurs, pourquoi une dinde dans le désert?
Bref, ce point de vue prends à parti le spectateur que nous sommes à la place du spectateur présenté dans le film et remet en question le "Pourquoi nous regardons des films? Pourquoi faut-il une salle pour projeter des films sur un écran?", remettre en question des idées fondamentales (ou pas) que nous vivons sans se poser de questions. "Pourquoi jouons-nous un rôle dans film?"; "L'image ne montre que ce qu'elle affiche mais n'indique pas ce qu'il y a autour" dont la scène avec le crocodile en peluche illustrera bien le propos. En bref ce point de vue met en scène des acquis de la vie courante dont nous ne nous soucions plus et qui n'ont parfois aucun intérêt, aucune raison d'être ou d'être comme elles sont.
[/spoiler]

Enfin, la scène finale amène à croire que c'est le début d'un nouveau film. Explosion du pneu et un tricycle pour enfant prend vie. Le principe de la réincarnation. Vous vivez, vous souhaitez être réincarné en concombre et vous recommencez votre vie sous un autre angle, avec un autre point de vue, un autre but, un nouveau destin. Et pourquoi un tricycle? Pour aucune raison assurément.

Pour finir, il est peu probable que ce film fut réalisé dans le but de répondre à des interrogations existentielles quelconques, ni même pour qu'un pecno comme moi s'y attarde autant et interprète autant de choses de ce film. C'est assurément l'oeuvre d'un mec comme n'importe qui, qui s'est dit "Tiens je vais faire un film mais je vais faire n'importe quoi, juste comme ça, parce que je sais pas trop quel thème choisir". Et ce film qui n'a, à première vue, aucune raison d'exister, semble finalement n'être là que pour voir qui peut tirer quelles conclusions de ce genre de "n'importe quoi" cinématographique.

C'est donc un film que je conseille sincèrement. Vous n'en ressortirez sûrement pas plus époustouflé qu'avant de le regarder, certains s'ennuieront peut-être, mais ne serait-ce que pour la surprise qu'un tel film peut susciter, l'expérience de le voir vaut vraiment le coup ne serait-ce que d'essayer.
De plus la réalisation est de très bonne facture, les effets spéciaux sont un peu miteux mais c'est assumé et puis malgré l'étrangeté du scénario ou du moins de son fil conducteur - de son idée initiale - le film vous décrochera sûrement quelques rires et sourires.
Notry
6
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Créée

le 11 sept. 2012

Modifiée

le 11 sept. 2012

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Notry

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