Dans la bande-dessinée de Bryan Lee O'Malley, Scott Pilgrim est un geek procrastinateur, un peu salaud sans le vouloir mais s'imaginant génial, sans emploi donc sans argent, bassiste dans un groupe de rock de garage un peu minable, affublé d'un colloc gay hype lui menant la vie dure, traînant dans tout les cafés, bars, clubs branchés ou pas de Toronto et cherchant à conquérir son grand amour, Ramona Flowers, tout en affrontant son passé... Bref, il représente l'archétype du jeune adulte qui ne s'est pas détaché de son adolescence. Et sur 6 tomes, l'auteur étale son univers et ses problèmes à travers une aventure déjantée, remplie de métaphores inspirées par la culture pop. Bref avec Scott Pilgrim, il a crée en quelque sorte la bible de l'adulescent d'aujourd'hui.

Pour l'adaptation cinématographique, Edgar Wright reprend uniquement la trame principale : Scott doit se confronter aux 7 ex de la fille de ses rêves pour sortir avec elle. Et par "se confronter", il faut comprendre se battre littéralement contre eux pour les anéantir, par "7 ex", 7 boss de fin de niveau ayant des pouvoirs mystiques ou des compétences de ninja (entre autres...) et par "fille de ses rêves", la fille qui utilise ses rêves comme une autoroute subspatiale pour livrer des colis. A l'instar de la BD, le scénario du film raconte l'histoire d'un personnage qui s'imagine résoudre ses problèmes à travers des références aux mangas, aux jeux-vidéos ou encore à la musique. Mieux encore, Wright justifie son adaptation en proposant un complément à l'oeuvre d'O'Malley sur un support différent : comme il le dit lui même, Scott voit sa vie comme un film... et Scott Pilgrim vs The World est ce film. Et dans son monde, il aime voir des onomatopées apparaître (voilà comment justifier un effet absolument kitsch qui ici se fond dans le film sans jamais poser de problème), vider sa barre de pipi, ou avoir une vie supplémentaire. Et cet aspect est poussé jusqu'à la narration elle-même puisque ce sont les combats, ceux contre les 7 ex maléfiques, qui font progresser la relation entre Scott et Ramona. L'exemple le plus évident étant le troisième combat, qui permet à Scott de faire le deuil de sa précédente copine qui lui a brisé le cœur.

Contrairement à Robert Rodriguez et Zack Snyder qui proposent des copié-collés de bandes-dessinées, Edgar Wright cherche à faire en sorte que son découpage donne l'impression qu'il s'agit d'une BD lue rapidement sans oublier qu'il fait avant tout une oeuvre de cinéma et non pas une vulgaire transposition utilisant le support original comme story-board. Le montage est aussi fluide qu'il est intelligemment rythmé. Cela permet par exemple d'avoir des scènes de combat dynamiques, drôles et inventives, et par conséquent extrêmement fun remplies de références visuelles, ce qui ne gâche en rien le plaisir. Wright est également l'un des rares réalisateurs actuels à savoir faire de la comédie en utilisant toujours de manière juste le cadre, le montage ainsi que l'ambiance sonore pour soutenir des gags ou des dialogues par ailleurs excellents. Des dialogues interprétés par un casting de jeunes acteurs talentueux ayant réussi à donner vie au personnage de Bryan Lee O'Malley. Micheal Cera est parfait dans le rôle de Scott Pilgrim, puisque dans un monde réaliste, il serait le personnage qu'on lui reproche de toujours jouer et d'un point de vue comique, engager un acteur d'Arrested Development (une des séries comiques les plus intelligemment écrite et réalisée, rappelons-le), c'est prendre une valeur sûre. Le casting nous révèle aussi deux acteurs (entre autres) très talentueux : Kieran Culkin, le frère de Macaulay en colocataire gay hilarant et Ellen Wong, en jeune chinoise amoureuse de Scott, dont c'est le premier rôle et j'espère pour elle pas le dernier. La bande originale est également une réussite d'autant plus qu'il s'agit d'un élément important dans l'univers de Scott Pilgrim. Du rock de garage des Sex Bob-omb à des sons plus électro collant à l'univers des clubs branchés auxquels on ajoute des morceaux pop-rock plus classiques inspirés par les playlists de l'auteur, l'ambiance musical est juste jouissive.

Scott Pilgrim vs. The World est donc une oeuvre cinématographique incontournable, à la fois une excellente comédie et un excellent film d'action, et surtout un parfait mélange des deux genres, située quelque part entre du Gregg Araki et le Speed Racer des Wachowski, bref un véritable conte pour geek, tristement passé inaperçu. Mais on peut facilement espérer que justice lui sera rendue et qu'il obtienne son statut de film culte dans les années à venir. Un film aussi bon et original ne tombera pas dans l'oubli... Et d'ailleurs, il a déjà inspiré l'excellente série Sherlock !
Belloq
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le 23 févr. 2011

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Belloq

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