"Scott VS Evil Ex. Get ready to rock !"

On a vu passer, ces derniers temps, des films qui se disent "de geek, par des geeks, pour des geeks" (geek étant un nom assez réducteur et souvent utilisé à tort et à travers, mais n'entrons pas dans un débat stérile) qui tentent de caresser les fans de pop-culture dans le sens du poil, en leur balançant de l'ersatz de film d'action/de comédie/ect... en se plantant lamentablement à chaque fois, simplement car à chaque fois, la façon dont cette même pop-culture est traitée est, au mieux ignorante de son milieu, au pire hautain envers le public visé.


Cependant, en 2010 sort un film du nom de Scott Pilgrim, réalisé par un Edgar Wright ayant à son palmarès la Trilogie Cornetto (Shaun of the Dead, Hot Fuzz et The World's End, trois comédies très sympathiques) et la série Spaced, tous faisant gage d'une bonne qualité et aussi montrant la manière dont Edgar Wright maîtrise ses références, les respecte. On peut parler de sa fameuse trilogie, dont chaque film correspond à un genre qu'il s'amuse à démonter, reconstruire, se moquer, et rendre hommage, en créant de nouvelles œuvres et assumant son héritage culturel.


Mais de tous ses films, c'est véritablement Scott Pilgrim qui lui permet de se lâcher, de s'amuser, dont le comics éponyme dont il est adapté (et que je recommande tout autant que le film) a été également créé dans un but similaire, à savoir, avoir un terrain de jeu pour exprimer ses références tout en exprimant sa propre créativité, en fonction du medium utilisé, car si le comics prend des éléments du manga et des animés pour créer une visuelle unique, le film, quand à lui, tire profit du jeu vidéo, en reprenant des éléments récurrents comme le style visuel (avec une esthétique aux petits oignons) ou la narration, ici très simple, voire simpliste (Gentil, battre méchants, sauver copine).


Gentil, incarné par un Micheal Cera qui incarne un vingtenaire ne sachant pas réellement quoi faire de sa vie, joue dans un groupe de rock indépendant (qui fait une excuse pour des combats en référence à la musique très sympathiques), qui sort avec une lycéenne mais qui en fait tombe amoureux de Ramona Flower, interprétée par Mary Elizabeth Winstead et qui a sept ex maléfiques... Comme dit plus haut, la trame vole pas bien haut, mais la découverte des ex maléfiques est un des moteurs du film, qui varient entre le vegan aux super pouvoirs, les jumeaux asiatiques, l'acteur international, ect,... est toujours plaisante, même si le fait que le film doive adapter ~1200 pages de comic book en 1h50 de film ne permette pas un développement profond des personnages (qui sont très creux dans le film, et qui servent juste de "rôles" au lieu de "personnages"), le boulot de Edgar Wright pour adapter le comics de Brian Lee O'Malley mérite d'être salué.


Mais si j'apprécie autant ce film, c'est pour d'autres points, plus ou moins subjectifs (même si nous sommes tous subjectifs et que l'objectivité est quasi inatteignable... Non, pas de débats stériles). En premier, ce film est, dans tout ce qui le construit, très personnel. Les références ne sont pas hachées pour dire "oué, mais vous aimez ça, les geeks, donc aimez le film" mais réellement fines et bien placées (Le Reversal + Shoryuken de Street Fighter dans le premier combat, la parodie de Dance Dance Revolution avec le jeu de Ninja Ninja Revolution), ainsi que l’esthétique très colorée et diversifiée de l'univers présenté, tout est une référence, mais contrairement à des cinéastes qui s'en servent comme argument de vente (et je me répète vachement en réalité), Edgar Wright est quelqu'un de bien veillant avec cette culture qui me donne de l'espoir pour les créateurs de demains et l'évolution des mentalités concernant les médias et arts actuels.


L'autre point que je souhaiterais aborder, plus "objectif", est que Edgar Wright, comme sur ses autres productions, est un génie de monteur, cadreur. Là où la majorité des films (sans compter les films d'animations) s'enferment dans de l'humour surtout dialogué, sans prendre en compte les possibilités du cinéma, Scott Pilgrim, comme sa trilogie Cornetto sont les résultats d'un homme qui joue véritablement avec son médium, parce que le cinéma est comme un bac à sable, qu'il maîtrise avec brio. Je pourrais partir sur une analyse, de comment il arrive à créer une dynamique entre les plans (comme le moment où le décor change lors d'un dialogue avec une utilisation intelligente du champ/contre-champ), mais cette critique est déjà bien trop longue pour ça, je vous renvoie plutôt sur cette vidéo de Tony Zhou qui explique en profondeur les techniques de Wright : https://www.youtube.com/watch?v=3FOzD4Sfgag (mettez les sous-titres Fr si l'anglais n'est pas votre point fort).


Pour conclure, Scott Pilgrim est un film sincère, qui ne tente pas d’appâter maladroitement un public dont le réalisateur fait partie, usant de techniques de mise en scène inventives pour créer un humour visuel, à tort oublié, ayant conscience de son statut de divertissement (intelligent, car même si divertissement rime avec abrutissant, ce ne sont pas des synonymes) et en ressort, pour moi, un grand film, ayant malheureusement pas suffit à rentrer dans ses frais lors de sa sortie cinéma (47 millions de dollars pour un budget de 60 Millions), même si le film a cartonné en DVD/VoD et qu'il est devenu culte pour beaucoup de personnes (dont moi), et qui, j'espère, encourage de futurs créateurs a également clamer leur références culturelles tout en créant de nouvelles œuvres. En tout cas, je suis rempli d'espoir.

Honeyxilim
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le 8 févr. 2017

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