Sept jours en mai traite, sur fond de guerre froide et de menace nucléaire, d'une guerre psychologique livrée au sein même du pouvoir américain entre le président Lyman et le général Scott (Burt Lancaster). L'esthétique choisie par le réalisateur Frankenheimer met en scène formellement cette lutte principalement interne dans un film haletant qui n'a que peu vieilli.
Le moment historique dans lequel se situe le récit contient déjà en soi assez de tension pour éprouver n'importe quel homme terriblement conscient d'avoir le destin de l'humanité au bout de son doigt. Or, outre à cet ennemi du dehors qu'est l'URSS, le président des États-Unis est confronté à un ennemi de l'intérieur qui veut le faire tomber. Lorsqu'il le découvre, il lui reste sept jours – d'où le titre - pour déjouer ce coup d’État. Ce compte à rebours resserrant l'intrigue participe à recréer l'ambiance de peur sourde, à la fois glaciale et moite, dans laquelle baignait la diplomatie américaine durant cette époque. De même, la dualité des personnages, qui d'abord affichent une loyauté patriotique envers leur président avant qu'on ne parvienne peu à peu à faire tomber leur masque, montre bien la suspicion et la confusion des rôles qui régnaient alors. Parmi ce trouble, le spectateur se retrouve malgré lui jeté, pris en otage - qu'il le veuille ou non, comme tous les citoyens d'un monde qui est en jeu - comme le suggère l'excellente première scène – manifestation devant la Maison Blanche - où la caméra, bousculée, lancée à terre, piétinée avant de se relever suit en plan subjectif les mouvements entre les deux camps opposés.
L'identification du spectateur est suggérée par les moyens que nous venons de nommer, de même que les rapports de force entre les deux camps commandés par le président et le général séditieux sont aussi mis en scène à travers le champ-contrechamp utilisé pour représenter les adversités dans les dialogues et les plongées / contre-plongées rendant compte de la domination d'un personnage sur un autre. La patte du réalisateur est sensible par ailleurs dans le parti qu'il prend en faveur du désarmement nucléaire - bien qu'au début il feint la neutralité, à l'image de son personnage clé, le colonel Casey (Kirk Douglas) d'abord adjuvant du général Scott avant d'en devenir l'opposant et de se ranger du côté du Bien qu'incarne le Président Lyman – ce que mettent en évidence les contre-plongées rendant grotesque la foule d'opposants pressée au meeting du Général Scott.
Malgré la détérioration matérielle du film et la désuétude des technologies utilisées, il reste, en raison du climat de paranoïa créé par les câbles interceptés, les trahisons politiques et les ennemis infiltrés au sein de l’État, complètement d'actualité, voire même intemporel. De plus, grâce à un excellent montage et à un scénario équilibré mêlant savamment mouvement et réflexion, cabinet présidentiel et terrain, il conserve un intérêt notable et procure un plaisir indéniable pour les cinéphiles que nous sommes.