Parce que la proposition de Steven Knight est intéressante. Peu connu du paysage hollywoodien, le cinéaste a quatre réalisations au compteur. Il a coutume d'écrire ses propres histoires, et sera à l'occasion récompensé pour deux de ses scénarios (Dirty Pretty Things, Locke).
Que vaut donc son quatrième film : Serenity ?
Il est à deux doigts d'une franche réussite. D'un point de vue distribution des rôles, on est bien servi. A vrai dire, le plus alléchant à l'idée de visionner cette oeuvre - d'or et déjà mis au ban par la critique positive - restait la pair d'acteurs présente sur l'affiche promotionnelle : M.McConaughey et A.Hathaway.
Serenity doit sa principale force à l'une des figures les plus charismatiques de cette génération.
Portant sa double casquette, tantôt celle de patriote américain dégénéré (Massacre à la tronçonneuse : nouvelle génération, Killer Joe, Le Règne du Feu, Le Loup de Wall Street), tantôt celle de figure patriarcale respectée (Paper Boy, Mud, Interstellar, Free State of Jones), McConaughey assure une fois n'est pas coutume, dans cet honnête thriller ambitieux.
Certes non exempt de défauts, S.Knight prend des risques intéressants dans cette petite aventure exotique prenant lieu sur les flancs d'une île escarpée.
Déjà, l'absence de repères géographiques, puis le montage atypique de Laura Jennings ainsi que les volontaires facilités d'écriture nous mènent sur quelques pistes. La subtilité est telle que j'ai cru à d'impardonnables boutades d'édition et de mise en scène. Ou alors était-ce un style artistique décousu de l'atmosphère général ? Non, en effet, ces plans rotatifs saccadés similaires à un gameplay d'un RPG ne servent pas à frimer.
Le dernier acte du film redéfinit l'oeuvre de S.Knight dans son entièreté. Même si les principales maladresses scénaristiques figureront dans cet ultime partie, il restera néanmoins pas mal de choses à se mettre sous la dent.
En plus de se définir comme une oeuvre multi-genre, Serenity en devient touchant. Il vous donnera également de la frustration, de la bonne et de qualité.
En somme Serenity est un belle curiosité qui dans son schéma narratif ferait pensé à une illusion de Penrose. Une oeuvre avec de la perspective mais aussi prospective. Ambitieuse donc, mais victime tout de même d'un manque de profondeur... D'impétuosités et de poésie.
Parce que l'oeuvre de S.Knight a ses subtilités. Et elles ne seront sans doute pas remarquées par un public s'appuyant sur une seule et unique grille de lecture.
Des métaphores visuelles par exemple comme la scène de nude de McConaughey. Alors bon, oui il est nu [ouh-ouh tralala] mais la scène du plongeon est très significative et tease sans conteste le revirement de récit que va connaître le film. A tribord toute [c'est le cas de le dire].
Nu dans l'eau sera l'acteur, comme un nouveau-né dans son sac amniotique, à l'intérieur donc de son créateur. Vous m'en direz tant...
Ainsi donc, j'affectionne ces œuvres ambitieuses maladroites, qui chavirent en ayant eu le courage de nous conduire - nous spectateurs - vers des eaux peu explorées.
Puis, on ne restera pas non plus indifférent face au travail de composition de Benjamin Wallfisch.
Enfin abrégeons. Ne vous fiez pas à la note bien basse de ce petit film sympathique. Dans la même veine, découvrez si ce n'est pas déjà fait, La Cabane dans les bois (2011) de Drew Goddard, qui se permet lui aussi ce genre d'ingénieuses bifurcations scénaristiques.