L'inspecteur William Somerset (Morgan Freeman), nous est présenté à une semaine de la quille. L'Homme désabusé, semble perdu, il ne se retrouve plus dans la société qui l'entoure. Apprêté d'un costume rétro et d'un chapeau d'un autre âge, il se voit confier une dernière affaire. Un ultime tour sur le terrain avant une retraite bien mérité. Comme un pied de nez à ce vieux briscard misanthrope, Somerset se voit affublé d'un partenaire en la personne du jeune et fougueux détective David Mills (Brad Pitt). Les deux hommes ne le savent pas encore, mais l'enfer va s'ouvrir sous leurs pieds. Bienvenue dans «Seven», le thriller majeur des années 90 réalisé par un David Fincher éreinté après sa calamiteuse expérience sur «Alien 3». Mais le futur réalisateur de «Fight Club» n'est pas seulement un esthète, non, avec l'aide de son génial scénariste Andrew Kevin Walker («Sleepy Hollow»), les deux hommes ont transformé ce qui était sur le papier qu'un énième «Buddy Movie» entre le vieux flic et le Rookie, en un thriller vertigineux, aussi viscéral qu'oppressant, aussi lugubre que frontal. L'histoire de ces deux flics poursuivant un psychopathe surnommé «John Doe» («sans identité» dans le jargon légiste, un parti-pris qui prendra toute son importance au cours du long-métrage, faisant de ce meurtrier, un «Monsieur tout le monde») tuant ses victimes par là où elles ont fauté, selon la bible et les passages se conférant aux sept péchés capitaux est ici, traité de façon différente par rapport au cahier des charges du film de psychopathe dit «traditionnel». En effet une des grandes forces du film réside dans le traitement de l'enquête policière. Au lieu de nous mâcher le travail en montrant les meurtres, Fincher nous la joue subjectif, en ne montrant que l'effroyable résultat final mettant ainsi le spectateur et les acteurs principaux sur le même pied d'égalité et dans le même état d'anxiété. Que l'on ne s'y trompe pas, «Seven» et ses meurtres hors champ à la mise en scène des plus morbides, reste une expérience traumatisante qui hante le spectateur bien après le visionnage (la scène de crime de «la Paresse» est à ce titre absolument glaçante.). L'autre grande force du film tient aussi dans son ambiance délétère au sein d'une ville inconnue elle aussi, une ville épurée jusqu'à son paroxysme, comme pour nous empêcher toute identification. Une cité en proie à d'incessantes averses (on n'avait pas vu cela depuis le «Blade Runner» de Ridley Scott). Une ambiance rendue possible grâce à la majestueuse photographie de Darius Khondji (directeur de la photo du récent «The Lost City Of Z» de James Gray), une des grandes révélations du film, sans oublier la musique expérimentale d'Howard Shore qui est là aussi pour faire de «Seven» une expérience troublante qui commence dès le générique du début. Le formidable duo Pitt/Freeman bataille ferme pour essayer de mettre fin aux agissements d'un tueur se définissant comme un ange exterminateur voulant faire expier l'être humain. Les deux hommes iront jusqu'au bout d'eux-mêmes, en franchissant les limites de la folie, de la violence au cœur d'un thriller immoral et sans concessions, miroir d'une société en perdition, sans repères moraux, une société rongée de l'intérieur par les monstres qu'elle a elle-même créés.