La première fois que j'ai vu Shaolin Soccer c'était entre l'année 2001 et l'année 2002. La nuit du 31 décembre au 1er janvier plus précisément. J'avais été invité par un copain à faire la fête avec ses amis geeks. Tandis que des mecs s'échangeaient des fichiers mp3 du Donjon de Naheulbeuk de disque dur à disque dur, d'autres mataient la fin d'un étrange remake d'Olive et Tom en version live action.
L'année suivante Shaolin Soccer s'était doté d'une aura culte et sortira en France dans l'été histoire de se changer les idées de la piteuse défaite de la France en coupe du Monde. (C'était par ailleurs, la première fois que je voyais un film en avant première sans le savoir.) C'était l'époque où l'on parlait pas mal du "cinéma de Hong Kong" et cette comédie impressionnait par sa vitalité et par l'originalité de son concept.
Et puis, on a un peu oublié ce film et moi-même j'avais le souvenir d'un film super débile, enchainant les blagues idiotes et aux effets spéciaux sans doute datés.
Et à le revoir, je m'aperçois que le film reste toujours assez bon : certes, y a du gag bien gras et on est dans la parodie, mais la structure narrative fonctionne. Le film ne triche jamais sur ses intentions et offre une progression logique (parce qu'hérité des films de Kung Fu) sans jamais ennuyer : c'est toujours drôle sans pour autant s'éparpiller.
Chow, en plus de jouer le rôle principal de Sing, l'ex-moine sympa mais un peu naif, se démerde pas mal dans la réalisation : il sait rendre son film rythmé, offre des idées de réalisations marrantes (la scène sur l'utilisation du Kung Fu dans la vraie vie dévoile des idées bien pensées) et utilise tout les archétypes hérités des films parodique qu'il a réalisé avant.
Les effets spéciaux n'ont pas SI vieillis que ça. Ok, c'est en parti faux : il y a quelques moments où ils jurent, mais leur côté simple accentue l'aspect cartoon et "parodie cheap mais overthetop" du film. Je pense que le fait d'avoir fait appel à des cascadeurs pros et des gens savant faire des arts martiaux au lieu de se reposer entièrement sur le montage ou sur les effets spéciaux fait aussi partie du charme du film : c'est toujours drôle.
Mais au final, il y a une lecture assez intéressante du film : cette bande de bras cassé dont plus personne ne veut qui maitrise des arts martiaux que tout le monde estime ringard est restée dans les strates basse de la société : serveurs, chiffoniers, employés à Carrefour (oui, un logo français dans un film hong-kongais, ça fait toujours bizarre.) Il y a un peu une revanche du prolétaire face au magnat du football verreux et de la finance (qui peut doper ses équipes et tire les ficelles des classements.) C'est d'ailleurs assez visible dans la scène où Sing fait visiter les magasins à Mui... parce qu'il est pote avec les agents de nettoyage et qu'il a promis de les aider en échange du service.
Shaolin Soccer est l'histoire d'une réappropriation populaire à la fois du foot mais aussi du Kung Fu. (Cf, la fameuse scène finale.) Ce qui est intéressant au moment où la Chine accentuait au même moment son libéralisme a outrance.
Par contre, je ne sais pas si c'est volontaire mais il y a pas mal de trous de scénarios ou de points inexpliqués. Notamment cette équipe de foot (assez balaise en plus) dans laquelle les deux attaquants sont deux femmes avec des grosses moustaches. D'où elle sortent, pourquoi elles font ça ? T'occupe. (Apparemment ça parodie, comme la scène de danse, d'autres films jamais sortis chez nous.)
Idem pour l'histoire d'amour entre Sing et Mui.
Elle lui avoue ses sentiments, il lui colle un vent. OK. Puis il apprend qu'elle est triste et qu'elle a été virée parce que ses pains étaient trop salés (vu qu'elle pleurait.). Ok. Elle arrive sur le terrain pour remplacer le goal sans que personne ne lui demande. Ha ? Et Sing se moque de son look.... pourtant on apprend dans la scène finale qu'ils se sont mariés. J'ai l'impression qu'il manque une scène ou deux entre ces deux là pour rendre leur histoire (prévisible mais mignonne) crédible.
Malgré ses gros défauts j'ai passé, encore une fois, un super moment devant Shaolin Soccer. Comme quoi.