Générique en forme d'images d'archives, accompagné d'une musique électronique façon Moroder et entrecoupé de cartons constitués de polices rouges sur fond noir... Impossible, dès les premières secondes du film de Jean-Bernard Marlin, de ne pas penser à l'ouverture du mythique Scarface de Brian De Palma. Dès lors le ton de Shéhérazade est lancé : ce premier film particulièrement prometteur s'attèlera à suivre les traces d'un parfait anti-héros, jeune voyou des milieux interlopes de Marseille dont la situation initiale n'est pas sans rappeler celle de l'emblématique Tony Montana.
S'inscrivant dans une veine naturaliste ( retranscription sans fard du milieu de la prostitution, caméra alerte et collant au plus près de ses sujets, interprétation vériste menée par une utilisation in situ du langage argotique méridional ) ce drame révèle entre autres choses les magnifiques Dylan Robert et Kenza Fortas, comédien et comédienne non-professionnels superbement dirigés par le réalisateur. Ainsi nous sommes littéralement noyés dans le monde du proxénétisme et de l'argent facile, le film s'avérant somme toute très immersif et donc réussi in fine.
Si Shéhérazade demeure néanmoins parfois maladroit dans son écriture ( quelques paraphrases visuelles peuvent en témoigner ça et là...) son sens de la nuance et du contrepoint permettent en définitive de s'attacher au personnage de Zach, ce dernier semblant terriblement antipathique sur une bonne partie du métrage. A cet égard la séquence du procès - véritable point névralgique du récit- annonce l'éventuelle rédemption du jeune voyou, rédemption mâtinée d’ambiguïté en fonction du point de vue adopté ; cette séquence évoque du reste le superbe Une Séparation de Asghar Farhadi, dans cette même manière d'interroger la ou les morales potentielle(s). Un film plus dense qu'il n'y paraît de prime abord, joliment documenté et qui assume pleinement ses références sans en être stupidement dépendant. A voir.